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Scandinavie : les syndicats mobilisés contre Tesla, les grèves s’étendent

Elon Musk, PDG de Tesla et homme le plus riche du monde, a construit la réputation de Tesla sur un principe résolument anti-syndical. La promesse : des salaires relativement élevés et des participations par distribution d’actions, mais par contre, interdiction de toute forme syndicale !

En Scandinavie, à partir des usines en Suède, les salariés sont en train de faire vaciller le modèle, exporté en Europe avec les premiers grands sites Tesla sur le continent.

Piquet du syndicat IF Metall devant le siège de Tesla à Stockholm (arenaev.com).

De 130 mécaniciens à quatre branches dans quatre pays !

Tout a commencé par une centaine de mécaniciens, soutenus par le syndicat suédois IF Metall, qui ont revendiqué une convention collective pour Tesla. Refus catégorique d’Elon Musk. Après plusieurs tentatives, finalement, le premier appel à la grève a été lancé le 27 octobre concernant 470 mécaniciens1. Puis, les salariés de Postnord, principal distributeur de courrier, ont déclaré l’arrêt de distribution de colis ou lettres aux sites Tesla – dont les nouvelles plaques d’immatriculation, ce qui empêche donc que de nouvelles voitures sortent des usines. D’autant plus que les travailleurs portuaires, dès début novembre dans quatre ports, mouvement élargi depuis à tous les ports suédois, refusent le transport de véhicules Tesla. Le détour par les ports danois ou norvégiens, momentanément envisagé, n’est pas plus une solution : les collègues des ports de ces pays ont également annoncé ne pas acheminer et décharger les voitures du constructeur.

Une flotte de camions danois mobilisés n’a pas pu agir plus longtemps, un syndicat danois annonçant rapidement que les camionneurs ne transporteraient pas de Tesla à travers la frontière. Le 7 décembre, c’est au tour du syndicat finlandais AKT d’annoncer que les véhicules Tesla ne seront plus déchargés en Finlande. Ces dernières semaines, cette « grève » très particulière s’est étendue au-delà de l’automobile et de la logistique, puisque des électriciens ont annoncé la fin des missions d’entretien sur les bornes de recharge liées à l’entreprise, avant qu’un syndicat du nettoyage appelle à cesser la collecte des déchets sur onze sites Tesla à partir de Noël. D’autres syndicats ont annoncé que leurs membres ne produiraient plus de pièces détachées – comme dans le cas du sous-traitant automobile Hydro Extrusions – ou ne travailleraient plus sur des pièces ou voitures Tesla pour la durée du conflit.

Une solidarité suffisante pour faire plier Tesla ?

En tout, même si le seul arrêt total de travail ne touche que quelques centaines de salariés de Tesla, ce sont maintenant quinze syndicats, dans au moins quatre secteurs différents et quatre pays de la Scandinavie, qui ont joint leurs efforts en solidarité.

Tesla a d’ailleurs saisi l’enjeu, et tente d’agir en justice contre la grève. Les salariés de Postnord ont pour le moment obtenu gain de cause en invoquant que leur refus d’acheminer le courrier de Tesla était couvert par le droit de grève, pendant que l’action des syndicats du nettoyage était encore en suspens. Le 22 décembre, la plainte de Tesla a été rejetée en appel, ce qui pourrait forcer Elon Musk à négocier malgré son violent anti-syndicalisme.

Si Tesla tente aussi de contourner la grève en embauchant des briseurs de grève, et en envoyant des plaques d’immatriculation directement aux clients, l’entreprise peine par exemple à fournir des pneus d’hiver – essentiels aux 50 000 Suédois qui conduisent une Tesla. Après plus de deux mois, 90 % des Suédois soutiennent le mouvement. Et il peut encore durer : le « trésor de guerre » du principal syndicat, IF Metall, permet pour le moment de payer les grévistes… au-dessus de leur salaire habituel !

Si le soutien à la grève reste ultra-majoritaire, c’est aussi parce qu’elle défend un modèle social « consensuel » : des conventions collectives qui doivent permettre d’éviter les conflits – les grèves sont très rares en Suède. Une revendication qui peut donc paraître timide face au rouleau compresseur patronal incarné par le richissime ami de Trump. Mais le simple fait que, par-delà les limites corporatistes des secteurs et syndicats, et par-delà les frontières, les travailleurs scandinaves s’unissent pour faire plier Tesla et son PDG surpuissant Elon Musk, doit nous montrer l’exemple. La solidarité entre travailleurs, tous secteurs et origines confondus, ce n’est pas une phrase creuse : c’est la seule manière de faire reculer le patronat.

Dima Rüger, 29 décembre 2023

 

 

 

1 Tesla n’a pas d’usine de fabrication en Suède, mais un réseau de « centres de services », c’est-à-dire de garages qui distribuent et entretiennent les véhicules, avec des salariés directement employés par Tesla.