NPA Révolutionnaires

Nos vies valent plus que leurs profits
Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Le gouvernement chinois aussi s’attaque aux retraites

Alors que l’économie chinoise traverse difficilement la période post-Covid et subit les conséquences des tensions impérialistes accrues, le Parti-État s’attaque aux acquis sociaux des travailleurs pour maintenir les profits de sa classe capitaliste.

Le gouvernement compte repousser progressivement l’âge de départ à la retraite pour atteindre, d’ici 2055, les 65 ans. L’âge de départ est aujourd’hui de 60 ans pour les hommes et de 55 ans pour les femmes.

Cette offensive féroce est justifiée par un rapport publié l’année dernière par l’équivalent chinois du Conseil d’orientation des retraites. Ce dernier indique que les caisses seront vides en 2035. Pourtant, les analyses montrent que le recul de l’âge de départ permettrait uniquement de repousser la terrible échéance à 2042. La réforme, en plus de ne rien résoudre, témoigne d’une volonté de prolonger tout en l’empirant un système déjà des plus précaires.

Un marché juteux offert sur un plateau aux capitalistes

Ce n’est néanmoins pas une catastrophe pour tout le monde. L’ex-vice-président de la banque centrale chinoise, Zhou Xiaochuan, y voit comme solution le développement des pensions de retraite individuelles.

Peu soucieux d’exposer ses contradictions, l’État chinois a réduit la taxe sur les entreprises dédiées aux retraites de 20 % à 16 % en 2022 (les salariés versent, eux, 8 % du salaire). Cette mesure va inéluctablement avancer la casse organisée des caisses de retraite.

Une offensive sur différents fronts

Dans le même temps, le Parti communiste chinois s’attaque également à la sécurité sociale. Les pensions individuelles sont passées de 482 à 160 yuans (de 60 à 20 euros). Ces pensions sont un montant mensuel que chaque individu peut utiliser pour payer ses frais de santé. Sa fonte est la conséquence des coûts exorbitants mis en jeu pour soutenir la politique zéro Covid. Le résultat sera le même : l’accélération des solutions privatisées. Cette mesure a provoqué des manifestations de plusieurs centaines de personnes à Wuhan et Dalian (grande ville du nord du pays, non loin de la frontière nord-coréenne). Les manifestants demandaient le retrait de cette réforme.

Une actualité de la lutte existe en Chine : grèves et manifestations augmentent en nombre, les victoires aussi, et montrent que les travailleurs prennent conscience de leur force. Alors que la question des retraites agite les travailleurs et travailleuses de France et d’Europe, il est nécessaire d’exprimer notre solidarité avec le prolétariat chinois confronté aux mêmes problèmes mais avec des salaires et des pensions bien pires que les nôtres.

Pierrot Forey

 

 


 

 

L’historique du système de retraite chinois

Mis en place après la fondation de la République populaire de Chine dans la décennie 1950, le système de retraite était alors basé sur le principe de financement par répartition avec un âge inchangé depuis, et une participation de 15 annuités (sur lesquelles nous reviendrons plus tard). Ce système ne concernait à sa création que les fonctionnaires (environ 45 millions de travailleurs).

Les réformes du système à travers les décennies vont venir couvrir plus de travailleurs et proposer de nouvelles sources de financement, mais toujours avec des programmes moins avantageux que le précédent.

Une première attaque est lancée en 1986 dans le cadre des réformes lancées par Deng Xiaoping en introduisant la retraite par capitalisation comme deuxième source de financement. C’est-à-dire que la taxe sur les entreprises ne prenait désormais plus en charge seule le financement de la retraite. Cette capitalisation individuelle est divisée par 120 mois, ce qui est censé couvrir le travailleur jusqu’à ses 70 ans. Une fois cette somme épuisée, il ne lui restera que la première partie de sa retraite financée par le régime par répartition.

En 1997, une deuxième caisse est ouverte pour les travailleurs urbains (400 millions de travailleurs) qui introduit une troisième source de financement : les entreprises peuvent désormais, sur la base du volontariat, contribuer au financement des retraites. Presque aucune entreprise ne propose cette option.

En 2014 est créée la troisième caisse pour les travailleurs ruraux (500 millions), et en 2015, la caisse des fonctionnaires est progressivement harmonisée sur la base de la caisse des travailleurs en milieu urbain.

Des disparités géographiques

Dans sa version actuelle, ce système nourrit des discriminations géographiques et des disparités économiques au sein de la classe des travailleurs. Alors que la caisse des fonctionnaires propose une retraite à environ 4 900 yuans (environ 620 euros), celle des travailleurs urbains chute à 2 900 yuans (365 euros). Pire encore, la caisse pour les travailleurs ruraux offre une retraite de base à environ 100 yuans (13 euros) !

Ces réformes témoignent d’une politique d’entretien des disparités entre les régions. Alors que dans la région de Guangdong (province limitrophe à Hong-Kong), neuf travailleurs cotisent pour la retraite d’une seule personne, des caisses sont déficitaires dans d’autres. Les travailleurs sont rattachés à la caisse de leur région ou ville de naissance. Cela signifie pour beaucoup de travailleurs migrants l’impossibilité d’élever leurs conditions de vie même en quittant leur ville natale. De même, nombre d’entre eux n’ont pas de cadre de travail formel (plateforme, absence de contrat de travail) et donc sont hors du système. Cotiser les 15 années nécessaires devient vite un défi, d’autant plus que de nombreuses entreprises « oublient » de payer cette taxe.

Pour beaucoup de personnes, le système de retraite actuel déjà ne permet pas d’en vivre. Les seniors doivent continuer à travailler pour compenser leur faible retraite. Le faible âge de départ, que le gouvernement prévoit de reculer progressivement, n’est que l’arbre qui cache la forêt.