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La droite réélue en Grèce : un « gouvernement stable » pour encore plus d’inégalités et de politique anti-migrants ?

Les résultats du deuxième tour des élections législatives en Grèce ont reconduit à son poste Kyriakos Mitsotakis, Premier ministre de Nouvelle démocratie, la formation de droite du pays au pouvoir depuis quatre ans. Cet ancien de la finance se targue d’avoir remis la Grèce sur les rails après la pire crise qui ait existé depuis la Grande dépression. Mais son prétendu miracle économique n’est qu’un conte de fée, que seuls 20 % des électeurs ont bien voulu croire (40 % des votants, il y a eu plus de 50 % d’abstentions).

Une victoire bleue… pâle

« Toute la Grèce est bleue », scandaient les partisans de Mitsotakis dimanche soir, en référence à la couleur de leur drapeau. À voir le nombre d’abstentionnistes, on pouvait déjà en douter ! Mais, si les récentes catastrophes ferroviaires et le naufrage tragique de centaines de migrants n’ont pas eu d’impact particulier sur les résultats, ils en ont bien eu dans les têtes : comment ne pas en vouloir à un gouvernement qui n’a pris aucune mesure pour empêcher des étudiants de retour chez eux de mourir du fait d’une simple défaillance électronique ? Comment ne pas être horrifié de ces centaines de morts, et d’un Premier ministre qui défend les garde-côtes n’ayant porté aucun secours à l’embarcation en grave danger ? Des réactions salutaires ont eu lieu dans la population, avec des rassemblements de solidarité et des slogans contre l’hypocrisie du gouvernement. Près de la moitié des électeurs ne se sont pas déplacés, et Mitsotakis n’aura la majorité absolue au Parlement que grâce à un nouveau système de scrutin qui permet un bonus de 50 sièges au parti arrivé en tête.

Manifestation de mars 2023 suite à la catastrophe ferroviaire

Surtout, de nombreux votes se sont portés vers des partis « anti-système », en tout cas présentés ainsi dans les médias. Ce qualificatif n’a en réalité que peu de sens : Syriza (17 % des votes) a montré son incapacité à trouver une sortie de crise et les nationalistes d’extrême droite de Elliniki Lýsi (Solution grecque, proche de l’Église orthodoxe grecque et qui a recueilli 4,5 % des suffrages) font simplement rentrer au Parlement une rhétorique anti-immigrés dure. Leur projet d’un mur de six mètres de haut à la frontière turque risque d’ailleurs d’être mis en place par Mitsotakis lui-même1.

Un programme de sortie de crise qui laisse les travailleurs sur le côté

Plébiscité par les milieux économiques, Mitsotakis présente un plan de sortie de la crise économique qui s’appuie sur le tourisme, une baisse de la fiscalité pour attirer les investissements étrangers, des embauches dans les hôpitaux, une hausse des salaires et la poursuite d’une politique migratoire « dure mais juste ». Les marchés sont optimistes, tout comme les dirigeants du monde entier : la Grèce est rentrée dans le droit chemin et la remise en cause du pouvoir des banques européennes ainsi que de la Troïka ne viendra pas de là. Les différents gouvernements grecs, notamment celui de Syriza, ont prouvé qu’ils pouvaient appliquer les « réformes structurelles » nécessaires pour obtenir un allégement de la dette.

Si l’économie grecque se porte mieux, avec un taux de chômage qui est redevenu acceptable pour un pays capitaliste, de l’ordre de 10 %, c’est bien le résultat de ces réformes criminelles qui ont poussé des millions de personnes dans la pauvreté durant des années. Avec l’inflation actuelle, les files d’attente aux banques alimentaires grossissent à nouveau, et 26 % de la population risquent de se retrouver dans la pauvreté2. Si la dette publique se dégonfle, elle reste tout de même la plus élevée de l’Europe, à 170 % du PIB, et celle des ménages reste élevée. Alors qu’il est difficile de se loger et de joindre les deux bouts, que les jeunes diplômés partent à l’étranger et que ceux qui restent ne trouvent que des emplois sous-payés et sous-qualifiés, les investissements militaires se portent bien, boostés par la guerre en Ukraine et les conflits avec la Turquie. Quant aux promesses de Mitsotakis, comment les croire ? Avec une telle dette publique et sans vouloir s’en prendre au patronat et à l’Église orthodoxe, principal propriétaire foncier du pays, comment financer les services publics et augmenter les salaires ?

Les travailleurs ont besoin d’un programme d’urgence qui aille dans leur intérêt : prendre sur les profits du patronat pour lutter contre l’inflation et la pauvreté. Les partis, comme celui de Yanis Varoufakis, ancien ministre de l’Économie de Syriza, qui défendent qu’une nouvelle mouture de la gauche au pouvoir changerait la donne, ne font que semer de nouvelles illusions. Partout en Europe, c’est en s’inscrivant dans un combat contre la bourgeoisie et en refusant les divisions des politiques criminelles contre les migrants que nous pourrons lutter contre la guerre de classe des capitalistes.

Selma Timis

 

 


 

 

1 Les autres partis représentés au Parlement sont le Parti communiste (KKE – 7,2 %) et le Parti socialiste (Pasok – 11,5 %). Deux autres formations d’extrême droite obtiennent des sièges, notamment l’organisation récente Les Spartiates, soutenue par un dirigeant d’Aube dorée pourtant emprisonné. Le parti antisystème de Yanis Varoufakis, ancien ministre des Finances de Syriza, n’a pas eu les 3 % nécessaires pour obtenir un siège. Les diverses formations d’extrême gauche ont rassemblé 31 110 voix, soit 0,60 % des suffrages.

2 https://www.ouest-france.fr/europe/grece/reportage-malgre-la-reprise-economique-des-grecs-englues-dans-la-pauvrete-4a77c6c6-efe5-11ed-bc4b-ac1b06b7bf07