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Quels alliés véritables des Palestiniens face aux larmes de crocodile des puissances impérialistes ?

[Introduction de Mathis lors de la réunion publique du NPA le 19 décembre 2023 à Paris]

Depuis le 7 octobre, le gouvernement israélien continue son offensive génocidaire contre la bande de Gaza (20 000 morts confirmés, des centaines de milliers de blessés et déplacés). La logique de nettoyage ethnique n’est pas nouvelle et se fait dans la continuité de la politique de l’État israélien depuis 75 ans, amplifiée par « le gouvernement le plus à droite » de son histoire.

La fuite en avant de Netanyahou

Netanyahou est en effet dans une fuite en avant, saisissant l’opportunité de la guerre pour échapper aux critiques de la population qui contestait massivement dans la rue ses volontés de concentration des pouvoirs et sa politique d’extrême droite pro-religieux qui pèse sur la population israélienne. Malheureusement, les organisateurs des manifestations n’ont pas souhaité dénoncer la violence du colonialisme envers les Palestiniens : mais il est impossible de revendiquer la démocratie quand on l’a refusée à tout un peuple.

Cette opposition démocratique a désormais rejoint l’« union nationale » autour de Netanyahou, qui compte reprendre le contrôle de Gaza en terrorisant et massacrant sa population, au prix de la vie même des otages israéliens (ce qui nous renseigne sur le caractère « ciblé » des frappes militaires). De là un grand émoi d’une partie grandissante de la population israélienne qui souhaite le retour en vie des otages. Tous ne souhaitent pourtant pas l’arrêt de la guerre, mais des organisations tentent tout de même d’expliquer que massacrer un peuple n’apportera jamais la sécurité à un peuple convaincu par son gouvernement que tout le monde veut sa peau. On a tout à espérer que ces organisations réunissant des milliers de Palestiniens et Israéliens réussissent à infléchir les mentalités de la population israélienne, alors que le gouvernement l’entraîne dans une impasse meurtrière. Car si Netanyahou sait où il veut aller, comme les différents gouvernements successifs d’Israël qui ont poussé à l’extension de leur territoire contre les Palestiniens, il ne sait pas où il va arriver. C’est la politique d’Israël depuis le début, depuis la guerre de 1948, la guerre de 1967 : s’étendre, réaliser le « Grand Israël » de la mer au Jourdain.

La politique du parrain américain

Netanyahou l’avait affirmé avec la transformation de Jérusalem en capitale israélienne : c’était la promesse de coloniser toute la vallée du Jourdain, et il avait reçu à l’époque l’appui de Trump, que Biden a dit qu’il ne remettrait pas en cause. Alors Netanyahou a saisi l’occasion. Mais jusqu’où aller aujourd’hui alors qu’il promet de « détruire le Hamas » qui administre Gaza ? Vider la population de ce territoire vers le Sinaï égyptien ? Les États-Unis ont sondé l’allié égyptien pour savoir s’il serait prêt à accueillir deux millions de réfugiés, financement à l’appui si c’était demandé. Mais l’Égypte ne veut pas. Et pour l’instant Israël en est au projet de gouverner lui-même Gaza par la force militaire, et déjà d’en vider tout le nord pour faire un ghetto tassé au sud… qui subit depuis quelques semaines de nombreux bombardements.

Ce qui n’est pas totalement au goût du parrain américain, plus « raisonnable », qui tient à maintenir l’ordre dans la région qui pourrait s’embraser (Israël lui sert à cela, tout comme le flic défend les intérêts des bourgeois, au risque de créer du désordre quand il prend ses aises). Le secrétaire d’État des États-Unis, Antony Blinken conseille plutôt de confier Gaza à une collaboratrice plus raisonnable, la direction de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et du Fatah. Sauf que celle-ci est déconsidérée. Alors, que va-t-il se passer ?

La guerre de trop, une étape vers la révolte ?

En même temps, l’offensive des nouvelles colonisations en Cisjordanie et la répression des Arabes de Jérusalem s’amplifient, avec environ 250 morts liés à la colonisation depuis le 7 octobre et des milliers d’expulsés par les bandes suprémacistes juives soutenues par l’armée…

Et si cette guerre de trop était une étape vers la révolte ? Qui récolterait la mobilisation des populations des pays voisins contre leurs propres gouvernements… ?

Ce sont bien les États-Unis et les autres puissances occidentales qui dirigent la politique israélienne

C’est bien de cela qu’ont peur les différentes puissances de la région et du reste du monde impérialiste. Celles-ci allient discours hypocrites autour d’une très faible aide humanitaire et un soutien inconditionnel à l’État d’Israël en continuant de lui fournir des cargaisons d’armes. Un bon exemple de cette hypocrisie à deux vitesses, c’est quand les États-Unis affirment qu’ils ne souhaitent pas « imposer un calendrier » en échange de leurs livraisons d’armement (c’est-à-dire qu’ils ne font pas pression pour l’établissement d’un cessez-le-feu) tout en demandant gentiment que les bombardements se fassent « discrets et ciblés ».

Contrairement à certains courants antisémites qui sous-entendent que la non-action des puissances impérialistes envers Israël est une preuve que les sionistes juifs contrôlent le monde, ce sont bien les États-Unis et les autres puissances occidentales qui dirigent la politique israélienne. Cet État gendarme sert de base avancée pour de potentielles futures interventions, à l’image de la participation d’Israël aux côtés de la France et de l’Angleterre contre l’Égypte de Nasser en 1956 qui souhaitait nationaliser le canal de Suez.

En réalité, si les grandes puissances s’intéressent à la situation à Gaza et versent des larmes de crocodile sur le sort des Palestiniens, c’est parce qu’ils ont peur d’un embrasement militaire dans la région. Que ce soient les États-Unis, la France ou le Royaume-Uni, ils multiplient les pressions sur le prétendu « axe de résistance » composé de l’Iran, du Hezbollah libanais et de la Syrie de Bachar Al-Assad. La présence d’une partie des flottes américaines et françaises sur les côtes de Gaza ne vise pas à acheminer de l’aide humanitaire, mais bien à tracer les limites à ne pas franchir, tant du côté iranien que du côté israélien. Il faut dire que les bombardements génocidaires d’Israël entraînent déjà des perturbations du commerce international dans la mer Rouge suite aux attaques des rebelles houthistes soutenus par l’Iran. Si aucune puissance régionale ne souhaite allumer l’étincelle, il est impossible de savoir jusqu’où l’incendie pourrait se propager, et quelles forces sociales pourraient décider d’entrer en scène.

Les différents États arabes ne soutiennent la Palestine qu’en parole

En tout cas, pour l’instant les différents États arabes ne soutiennent la Palestine qu’en parole pour ne pas se couper de leurs populations. Si on prend l’Algérie par exemple, le régime de Tebboune a d’abord interdit les deux premières manifestations de soutien aux Palestiniens organisées à Alger avant d’organiser les siennes, tout en essayant de canaliser la colère et l’indignation des masses uniquement vers Israël et non vers sa propre inaction.

L’Algérie n’est évidemment pas la seule dans ce cas-là, car malgré quelques petites différences d’attitude, c’est bien l’impuissance qui se dégage de la dernière conférence de la Ligue arabe. Au-delà des bavardages, ce sommet n’a retenu aucune proposition de nature à contraindre Israël ou ses alliés à imposer au minimum un cessez-le-feu. La voix de l’Arabie saoudite ajoutée à celles du Bahreïn et du Qatar ainsi que des autres pays « normalisateurs » souhaitant conserver des relations avec Israël (mais surtout avec les États-Unis !) ont réussi à neutraliser toutes les propositions d’une dizaine de pays, dont l’Algérie, le Liban et l’Iran, préconisant des sanctions sur le gaz et le pétrole envers les soutiens inconditionnels d’Israël pour les contraindre à revoir leurs positions. Cet échec a fait dire à beaucoup de monde qu’au final cette ligue ne sert à rien sinon à « exprimer ses inquiétudes ».

Ce n’est pas la première fois que les Palestiniens sont abandonnés par les États qui assurent pourtant en parole leur soutien plein et entier. Depuis la signature des accords d’Abraham en 2020 orchestrés par les États-Unis, nombreux sont les pays qui se refusent à couper leurs liens économiques et politiques avec Israël, et donc avec les États-Unis. Mais les trahisons n’ont pas commencé avec les magouilles de Washington. Déjà en septembre 1970, le roi de Jordanie massacrait et expulsait les réfugiés palestiniens de son pays par peur d’une alliance entre eux et les exploités de son royaume : la lutte sociale, voilà de quoi ont peur tous les exploiteurs. Quant à la Syrie du régime Al-Assad, n’oublions pas qu’elle a participé à la répression des Palestiniens pendant la guerre civile libanaise, mais aussi en 2011 quand les réfugiés palestiniens exprimaient leur volonté de rejoindre la révolution en cours : les troupes syriennes ont alors trouvé le Jihad islamique et le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) comme alliés pour écraser les manifestations dans le sang.

Mobilisations des Palestiniens d’Israël

Cette activité des masses dépassant le cadre des régimes et gouvernements se retrouve en Palestine et en Israël : de nombreuses mobilisations « pour la dignité » ont essaimé dans la bande de Gaza et la Cisjordanie avant d’être écrasées par les « dirigeants de la résistance palestinienne », Hamas en tête. En 2021, ce sont les Palestiniens d’Israël, citoyens de seconde zone, qui se sont mobilisés par dizaines de milliers contre les expulsions et la colonisation de Jérusalem-Est. Ceux-ci constituent 20 % de la population de l’État israélien. Victimes de nombreuses discriminations, ils occupent les emplois les plus difficiles et les moins bien payés : c’est pour ça que leur mobilisation fait à la fois peur à Netanyahou mais aussi au Hamas, qui refuse de se laisser déborder par une mobilisation populaire et ouvrière.

La cause palestinienne résonne dans toute la région et au-delà

Heureusement, nous savons que la Palestine a des alliés bien ailleurs que dans tous ces régimes corrompus, qui ne vivent que de l’oppression des peuples. En effet les Palestiniens trouvent leurs alliés dans les populations du monde entier qui se mobilisent depuis des semaines, principalement dans les pays arabes où l’on connaît trop bien les ravages du colonialisme.

Ces mobilisations mettent la pression sur les États, pas encore au point d’obtenir un cessez-le-feu ou la fin de la colonisation, mais quand même de les forcer à parler d’aide humanitaire, de bombardements « discrets et ciblés ». En Allemagne, l’un des principaux soutiens du « droit inconditionnel d’Israël à se défendre », où le gouvernement va jusqu’à demander de reconnaître l’existence de l’État d’Israël pour obtenir la nationalité, le premier ministre Scholz défend désormais la nécessité d’un cessez-le-feu. Même situation en France, où certaines des attaques contre les soutiens à la Palestine se sont un peu calmées, comme à Nanterre où la présidence de l’université s’est refusée à relayer les calomnies contre nos camarades du NPA, qu’elle avait elle-même initiées ! Quant aux États-Unis, Biden fait tout pour empêcher la mobilisation massive des jeunes étudiants et des juifs antisionistes dont les manifestations ont fait le tour du monde sur les réseaux sociaux.

La mobilisation de soutien à la Palestine prend d’ailleurs des airs de « printemps arabes ». Dans de nombreux pays, les manifestants se saisissent des manifestations pro-palestiniennes non seulement pour dénoncer l’impérialisme et l’inaction de leurs dirigeants, mais aussi leurs conditions de vie et de travail, l’absence de démocratie pour les pauvres et les travailleurs. D’où les différentes tentatives des États pour y couper court : que ce soit en interdisant certaines manifestations, ou en les organisant et les encadrant.

Nous n’avons rien à attendre des machinations des différents États capitalistes : c’est par la solidarité internationale des travailleurs, que l’on voit déjà en partie à l’œuvre, que nous pourrons espérer mettre fin à cette société barbare.

Intervention de Mathis du NPA-Jeunes à la réunion publique du 19 décembre 2023