Cet été a été marqué par une crise sans précédent des urgences, dépassant celle de 2022. D’après une étude du Samu, au moins 163 établissements de santé ont dû fermer ponctuellement leur service d’urgence faute de travailleurs durant l’été, et plus d’un service sur deux a connu un fonctionnement perturbé menant au moins à une fermeture. En effet, les services d’urgence qui ont tenu ont été souvent contraints de contenir leur activité à la seule gestion des urgences vitales. Dans les autres services, il a fallu travailler dans des hôpitaux peu adaptés à des températures extérieures dépassant (comme chaque été) les 30 degrés et dont les systèmes de climatisation sont souvent défectueux ou mal entretenus, quand ils existent ! Le père d’un enfant hospitalisé à Bordeaux a investi lui-même dans une climatisation pour la chambre de son fils qui dépassait les 37 degrés, des soignants mettaient des pains de glace sous leur blouse pour espérer se rafraîchir. On se doute que les enfants de ministre ne vont pas dans ces chambres.
Face à la situation, le gouvernement refuse de mettre les moyens nécessaires pour seulement entretenir les infrastructures, mais aussi pour mieux rémunérer les personnels, ce qui, soit dit en passant, permettrait d’embaucher. Pire encore, alors que 10 000 lits ont été fermés depuis 2020, il cherche, à l’occasion de la préparation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2024, à toujours faire des économies. Des économies qui touchent les travailleuses et travailleurs de la santé qui n’obtiennent pas de revalorisation salariale conséquente, mais aussi les patients. Après l’injuste « forfait urgence », il s’agit maintenant d’augmenter le « reste à payer » des médicaments remboursés, des consultations médicales et des actes paramédicaux comme les soins infirmiers et les séances de kiné. Tant mieux pour les mutuelles et le règne du fric pour ceux qui en ont…
Emma Martin et Célian Oswald
À l’hôpital public, compenser l’inflation en bossant pire
Le gouvernement annonce des « augmentations » dans la santé en évoquant 1,1 milliard d’euros pour le travail de nuit. Toute amélioration effective des rémunérations est évidemment bienvenue ! Cela étant, comme depuis des années, celles-ci restent parcellaires et ne concernent pas tous les professionnels : elles sont cantonnées au travail de nuit (+ 25 % par rapport au tarif de jour), aux jours fériés et aux dimanches (+ 20 % par rapport au tarif actuel). Le gouvernement a estimé que, pour une infirmière à mi-carrière, cela correspondrait à 300 euros de plus par mois, si elle fait des nuits. Ces mesures annoncées comme de véritables avancées par le gouvernement doivent encore être discutées lors du vote des budgets de l’hôpital public en octobre, rien n’est donc vraiment garanti. Il faut aussi prendre en compte l’effet de l’inflation qui culmine à plus de 5 % : ces augmentations sont d’ores et déjà grignotées par la hausse des prix. Par ailleurs, le gouvernement a annoncé mi-août vouloir effectuer 15 milliards d’économies en réduisant notamment les dépenses de santé, un jeu à somme nulle donc, dans lequel on économise d’un côté pour donner de l’autre.
Certains personnels soignants gagneront un peu plus à condition de travailler dans des conditions plus contraignantes et plus dures, par exemple de nuit ou les dimanches et jours fériés, précisément là où peu de monde souhaite bosser. 500 euros nets d’augmentation de salaire pour toutes et tous sont nécessaires !
(Article paru dans Révolutionnaires numéro 5, septembre 2023)