Nous publions ci-après la traduction de l’éditorial de nos camarades du RSO d’Allemagne, en date du 25 avril, qui évoque les multiples facettes de la répression étatique qui s’abat sur les manifestations de soutien à la population palestinienne.
Alors que les massacres d’Israël ressemblent de plus en plus à un génocide, le gouvernement allemand maintient son soutien inconditionnel. Les protestations sont diffamées en bloc comme étant antisémites et sont étouffées par l’intimidation, la diffamation et la violence policière. Les médias qui, il y a peu, rendaient compte des grandes manifestations en Israël contre le gouvernement d’extrême droite en place, ne savent plus voir que de l’antisémitisme dans la solidarité avec les victimes des actes de guerre qui se poursuivent. À Berlin, on recourt désormais à un nouveau moyen : ceux qui protestent deviennent la cible de sanctions étatiques directement dans le monde du travail.
Du 12 au 14 avril, Berlin devait accueillir le « Congrès Palestine 2024 – Nous accusons ! », où des groupes solidaires de la Palestine devaient se rencontrer, échanger et dénoncer la complicité du gouvernement allemand pour ses livraisons d’armes.
Quoi de plus naturel que de ne pas détourner les yeux lorsque, avec le soutien de l’Allemagne, plus de 34 000 personnes sont tuées à Gaza, que plus de 2 millions de personnes prises au piège sont systématiquement exposées à la faim, que leurs maisons et leurs hôpitaux sont bombardés ?
Des antisémites juifs ?
Invité, le recteur de l’université de Glasgow, Ghassan Abu Sitteh, qui a vécu de près la souffrance à Gaza pendant 43 jours avec Médecins sans frontières, voulait en parler. Il s’est vu refuser l’entrée en Allemagne ! Une campagne de dénigrement sans précédent avait déjà eu lieu avant le congrès, où il était question d’« antisémitisme » et de « glorification du terrorisme ». Il ne s’agissait pourtant pas d’un congrès du Hamas islamiste ou de groupes qui lui sont proches, mais de formations de gauche, parmi lesquelles la Voix juive pour une paix juste au Proche-Orient. Or, parce que la Voix juive ose critiquer le projet sioniste de colonisation, responsable de décennies d’oppression des Palestiniens, ses membres (juifs !) sont également qualifiés « d’antisémites ». Son compte bancaire, qui devait servir à financer le congrès, a été supprimé. La Voix juive souligne à juste titre combien il est absurde que la police et les tribunaux allemands les accusent d’antisémitisme alors qu’ils sont juifs et les soumettent à la répression.
Au mépris total de la liberté de réunion, la police a dissous le congrès. Comme elle n’a pas pu présenter d’arguments de fond, le commandant de l’intervention a déclaré qu’il avait « des raisons suffisantes de supposer que des propos délictueux seraient tenus si le congrès se poursuivait ».
Apparemment, il a été décidé en haut lieu que le Congrès sur la Palestine devait être empêché par tous les moyens et que, par conséquent, des « propos délictueux » devaient être « présumés ». Le gouvernement et les grands médias veulent faire taire les protestations par tous les moyens. Ils ne cessent de faire référence à l’attaque barbare du Hamas le 7 octobre 2023 comme point de départ. Mais qu’est-ce que cela signifie ? Une personne israélienne tuée doit-elle être« récompensée » par des centaines de morts à Gaza ?
La protestation n’a pas diminué, au contraire plusieurs milliers de personnes ont bruyamment défilé à Berlin pour protester contre les actions de la police et des autorités.
Fermeture de Phantalisa et Alia
La semaine dernière, deux centres pour jeunes femmes, jeunes filles et minorités de genre ont été fermés à Friedrichshain-Kreuzberg. Le conseiller municipal CDU, qui a résilié sans préavis le contrat des deux centres, justifie sa décision par le fait qu’une des directrices était annoncée comme intervenante lors du congrès sur la Palestine et que des employés ont participé à des manifestations pour la Palestine pendant leur temps libre.
Il se réfère au quotidien B.Z.1, qui est à ses yeux manifestement synonyme de qualité journalistique, et à ses articles haineux sur le Congrès pour la Palestine.
L’engagement pour des dizaines de milliers de victimes civiles à Gaza est diffamé comme étant antisémite et résultat : des jeunes femmes et jeunes filles sont privées d’un espace de protection. Cette décision scandaleuse suscite des résistances, et pas seulement parmi les travailleuses et travailleurs sociaux, mais aussi chez des travailleurs et syndicalistes d’autres secteurs. Nous ne pouvons pas laisser les gouvernants poursuivre leur politique infâme !
1 Presse à sensation ultra-réactionnaire