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Algérie : Christophe Gleizes face à une machine juridique répressive

À moins d’une grâce présidentielle, le séjour de Christophe Gleizes en prison risque d’être long. Le tribunal de Tizi Ouzou vient de le condamner, ce 3 décembre, à sept ans de prison pour « apologie du terrorisme » et « atteinte à l’unité nationale ». Des motifs farfelus et ubuesques que les tribunaux algériens invoquent souvent pour écrouer des militants et de simples citoyens pour des avis politiques.

L’article 87 bis, qui a broyé Christophe Gleizes

Au cœur de cette machine à broyer et qui a alourdi la peine du journaliste sportif Gleizes, il y a le liberticide article 87 bis du code pénal. L’affaire était pourtant simple : Christophe Gleizes, journaliste sportif, collaborateur de la revue So Foot, s’est déplacé en Kabylie pour mener son enquête sur le club phare de la région, en l’occurrence la Jeunesse sportive de Kabylie (JSK). Le seul reproche que pourraient lui faire les autorités, est de mener un travail d’enquête journalistique sans demander une accréditation. Ce qui est considéré comme délit dans la loi algérienne, mais punissable d’une simple amende. Alors par quel miracle une si banale affaire bascule-t-elle soudainement dans une tout autre dimension, celle du « terrorisme » et de « l’atteinte à l’unité nationale » ? Un simple contact du journaliste avec un membre du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK), toujours dans le cadre du sport aura apparemment suffi. Depuis 2022, et en vertu de l’article 87 bis, cette organisation nationaliste kabyle (proclamée en 2001) est classée comme organisation terroriste aux côtés de Rachad, une organisation d’obédience islamiste.

Au-delà des divergences avec ces deux organisations réactionnaires à combattre politiquement, il est nécessaire de souligner la dangerosité d’un tel article dont l’accusation pour terrorisme, tellement vague et élastique, peut être brandie contre n’importe quel militant, syndicaliste ou citoyen. Et Christophe Gleizes en paie chèrement le prix avec une peine injuste, assurément alourdie par le climat de tensions diplomatiques et de suspicion qui règne entre les deux États algérien et français depuis maintenant deux ans.

Un contexte diplomatique qui nourrit la suspicion

Le contexte entourant cette affaire a aussi pesé de son poids et déterminé le jugement. Cela fait deux ans que les deux États s’adonnent à un échange d’accusations et parfois d’invectives, allant jusqu’à l’expulsion d’ambassadeurs et de diplomates. Ce climat de tension et de suspicion a joué contre Christophe Gleizes qui se retrouve pris dans ce piège.Il n’y a pas lieu que des citoyens paient le prix des frictions de leurs dirigeants. L’arbitraire ne vise pas que des ressortissants ou binationaux français. Certains militants syndicalistes algériens le subissent aussi, pour des faits de grève. Nous joignons notre voix à toutes celles qui appellent à la libération de Christophe Gleizes et de tous les hommes et femmes détenus politiques qui croupissent encore dans les prisons en Algérie.

Correspondants