Nos vies valent plus que leurs profits

Ateliers SNCF de Quatre Mares : toutes les cases de la colère sont cochées

À Quatre Mares, près de Rouen, où l’on répare les moteurs et les bogies des TER normands et bretons, ainsi que les nez d’une grande partie des TGV, les cadences de travail ne font qu’augmenter depuis la mise en place de la concurrence dans le secteur ferroviaire. Désormais, c’est une dizaine de moteurs de toute taille qui sortent de l’atelier chaque semaine. Pour les TER, une rame complète est remise à neuf en une centaine de jours. Si la direction a recruté massivement ces dernières années pour honorer ses carnets de commande, c’est surtout par le biais de l’intérim : plus de 300 sur un effectif de 800. Elle a également mis en place le « séquençage » dans l’organisation du travail.

Tout ressemble de plus en plus à l’usine, avec l’ambiance de répression qui va avec du côté des chefs, petits et grands, en premier lieu vis-à-vis des intérimaires. Pour eux, même quand la production est stoppée, il faut trouver du travail là où il y en a, sous peine de voir son contrat se terminer. C’est le cas dernièrement pour un mécanicien accusé de se reposer en salle de pause, pendant que toute son équipe était à l’arrêt forcé, et qui a été viré du jour au lendemain.

Et même pour les embauchés, au statut ou contractuels, la vie n’est pas rose. Quand on parle avec les collègues de nos salaires, on s’aperçoit bien souvent qu’on est au minimum des grilles qui ne font déjà pas rêver. Des accords « Classification et Rémunération » ont pourtant été signés en 2022, par la CFDT, l’UNSA et Sud Rail qui nous vantaient alors un changement sur nos fiches de paye. Mais cet accord met plutôt en valeur la « polycompétence », un gros mot pouvant se traduire par « travailler plus pour gagner plus ». Et dans la réalité nos salaires n’ont pas bougé depuis 2022. Alors, en échange on a le droit à des « primes » et quelles primes ! 25 euros en chèque cadeau quand il n’y a pas d’accident avec arrêt de travail pendant 300 jours dans une équipe… Sauf pour les intérimaires, qui sont en revanche pointés du doigt lorsque ce sont eux qui ont un accident qui fait « chuter » la prime.

Les accidents sont de toute façon monnaie courante dans l’atelier, entre des équipements trop peu entretenus et les cadences de folie. On en est déjà à trente accidents cette année dont la moitié n’ont pas fait l’objet d’arrêt… Pourtant avec les résultats de la SNCF, 950 millions de bénéfices sur le premier semestre de 2025, ce n’est pas l’argent qui manque pour réparer les trains dans de meilleures conditions et augmenter nos salaires au moins de 400 euros pour tous. Pour que ces revendications prennent vie, il faut qu’on s’organise, qu’on reprenne le chemin de la grève. La première chose à faire est de ne pas laisser la direction virer nos collègues intérimaires comme des malpropres. Exigeons leur embauche immédiate et aucun salaire en dessous de 2 000 € quel que soit notre statut.

Correspondants