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En Argentine, seule la mobilisation pourra vaincre les projets de Milei

Le Parlement adopte la « loi omnibus » du nouveau président Milei, dont la politique est taillée sur mesure pour le FMI. Les syndicats tentent de négocier le poids des chaînes des travailleurs, pendant qu’un mouvement populaire, dans la rue, cherche à coordonner les assemblées locales pour faire dérailler les plans du patronat, en poussant à la grève générale.

Le parlement argentin vote un accord à la « loi omnibus », un texte initial de 664 articles visant à attaquer les services publics, les droits du travail, démocratiques, de genre, etc. Une attaque d’ampleur. Le nouveau président, qui prêchait le passage en force constitutionnel, s’est ravisé, collaborant finalement avec la « caste » politique qu’il prétendait dénoncer. Sa politique, dictée par le FMI, a reçu un tonnerre d’applaudissements au forum de Davos après qu’il a expliqué vouloir réduire l’intervention de l’État à néant pour le profit des grandes entreprises. Avec la complicité de Macron, qui lui apportait son soutien dès son élection en s’affichant avec un maillot de foot dédicacé par Milei. L’ouverture aux investissements étrangers sans restriction fait l’affaire des grandes multinationales comme Total ou Stellantis. Le géant de l’automobile a racheté 20 % de Argentina Lithium & Energy pour s’accaparer le minerai nécessaire à la fabrication de voitures électriques.

Sans les syndicats, la répression s’accentue

Le 24 janvier, en plein été, plus d’un million de travailleurs, majoritairement du public (santé, enseignants, fonctionnaires administratifs, etc.) mais aussi du privé (pneumatique), manifestaient contre la loi omnibus dans toute l’Argentine1. Depuis cette mobilisation massive appelée notamment par les centrales syndicales – la première en cinq ans –, les bureaucraties négocient avec l’exécutif pour enrayer les pires articles de ces lois. Cette stratégie de la défaite est commune avec les partis péronistes2, précédemment au gouvernement et responsables de l’élection de l’extrême droite. Face à l’atonie syndicale, un mouvement de gauche radicale s’organise pour se mobiliser dans la rue. Depuis le 30 janvier, des rassemblements se tiennent à travers tout le pays, réprimés par la police qui procède à des détentions arbitraires et passages à tabac de journalistes, militants syndicaux ou de figures ouvrières comme celle de Chiquito Belliboni, porte-parole des piqueteros.

Coordonner un mouvement populaire à la base

À l’approche de la rentrée (c’est l’été en Argentine), il s’agit de s’appuyer sur ce mouvement pour faire reculer Milei. Des assemblées d’entreprises, de corporations et de quartiers tentent de se massifier et de se coordonner pour peser, indépendamment des centrales syndicales. Une centaine d’assemblées, regroupant chacune environ 200 personnes, ont donné lieu à une « assemblée des assemblées ». Un modèle hérité de l’Argentinazo, sur lequel miser pour construire la grève générale : ce mouvement de 2001, déclenché dans un contexte croissant de pauvreté et de chômage par une crise du système bancaire rendant indisponibles les salaires, avait entraîné la démission de cinq gouvernements successifs.

La question des prix s’annonce aussi explosive. Avec 40 % de pauvreté et une inflation annuelle de 200 %, les travailleurs peinent à remplir le frigo. À tel point que le troc signe son retour parmi les classes populaires.

Lamine Siout

 

 

(Article paru dans Révolutionnaires numéro 10, février 2024)

 

 

1  Lire https://npa-revolutionnaires.org/argentine-la-mobilisation-de-la-rue-remporte-le-premier-round-face-a-milei/

2  Courant politique longtemps majoritaire parmi la bourgeoisie argentine, le péronisme revendique un État providence fort et militariste, un idéal de conciliation de classe et de justice sociale. La CGT comme le gouvernement sortant de Massa s’en réclament.