Nos vies valent plus que leurs profits

Entre le marteau et l’enclume du système agricole capitaliste

Les investissements nécessaires aujourd’hui dans n’importe quelle exploitation agricole sont devenus colossaux. Tracteurs toujours plus gros, engrais, pesticides, semences hyper-productives : sur tous les plans, l’innovation agricole a cherché à maximiser la production et les rendements.

Cela fait le bonheur des multinationales, fabricants d’engins agricoles, semenciers et aussi des banques qui enchaînent les agriculteurs par des dettes.

Les groupes Syngenta, Bayer, BASF, Corteva, dont les chiffres d’affaires annuels se comptent en milliards de dollars (13 pour Syngenta en 2021), se partagent à eux seuls plus de la moitié de la production de pesticides dans le monde et pèsent de tout leur poids contre l’interdiction de leurs produits. Les groupes Syngenta et Bayer (Monsanto) développent également les variétés de semences qu’ils vendent cher aux agriculteurs, et dont la reproduction à des fins commerciales est interdite, ce qui les oblige à en racheter tous les ans.

Derrière les agriculteurs, il y a donc une multitude d’acteurs qui bénéficient du modèle actuel. Mais il y a également tout l’aval de la chaîne de production alimentaire qui met une pression énorme pour continuer à produire, et qui dicte ses prix. L’industrie agroalimentaire, la coopération agricole, instance qui regroupe les coopératives agricoles de France, et la grande distribution, imposent des quantités de production pour des prix d’achat dérisoires aux agriculteurs. Sur un blocage de l’usine Président (Lactalis) de Bouvron, en Loire-Atlantique, des éleveurs laitiers dénonçaient des prix d’achat imposés par l’entreprise bien en dessous des revendications : « Nous demandons une augmentation de 5 % du prix du lait, Lactalis impose 1 % », relate un responsable local de l’Union nationale des éleveurs livreurs Lactalis (Unell).

La FNSEA et les chambres d’agriculture sont le relais de ces grands groupes et de leurs intérêts auprès des agriculteurs, qu’ils poussent dans la fuite en avant destructrice du capitalisme agricole.

Jean Einaugig

 

 


 

 

Quelques chiffres sur l’agriculture

Nombre d’exploitations en baisse
1970 : 1 587 000
2020 : 390 000

Surfaces qui s’agrandissent
1970 : surface moyenne 19 ha
2020 : surface moyenne 69 ha

Un modèle qui favorise les gros et fait disparaître les petits
Entre 2010 et 2020, le nombre des micro-exploitations, par exemple, ont baissé de 31 %.

Beaucoup d’agriculteurs pauvres
25 % des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté

 

 

(Article paru dans Révolutionnaires numéro 10, février 2024)