Samedi 16 novembre à Marseille, plus de 80 personnes se sont retrouvées autour de la table ronde contre les licenciements organisée par les grévistes d’ID logistics et Révolution permanente, avant de poursuivre la soirée autour d’un repas et de concerts.
Depuis début juin, les rumeurs de fermeture du site ID Logistics1 de Saint-Antoine, dans les quartiers nord de Marseille, se propageaient chez les salariés. Amazon, leur principal donneur d’ordre a décidé de ne pas renouveler le contrat de sous-traitance pour les livraisons d’une partie des Bouches-du-Rhône. « Ce sont les travailleurs qui réapprovisionnent les machines à café qui nous ont appris que les contrats n’étaient pas renouvelés ! », raconte un gréviste.
Dans l’entrepôt, les salariés « trient de 4 h 15 à 11 h 35 les colis » du géant mondial du commerce en ligne. De « 12 000 à 21 000 colis » sont ensuite acheminés par « jusqu’à 150 chauffeurs » pour être livrés aux différents clients, et ramenés sur place si la livraison n’a pas pu avoir lieu. Le tout dans des conditions de travail loin d’être optimales.
Ce n’est que dans le courant du mois de septembre que la direction a finalement annoncé la fermeture… d’ici fin octobre. Elle propose une mutation à Bollène, soit à plus de 135 kilomètres de là, en s’appuyant sur une clause de mobilité incluse dans les contrats de travail. Alors les calculs sont vite faits : « faire les aller-retours, c’est plus de 900 euros par mois », et s’il fallait déménager, il faudrait « trouver un logement, scolariser les enfants en moins d’un mois », rappelle une gréviste. Quand ils demandent si des aides sont prévues pour ceux qui accepteraient, la direction explique que non. Et pour celles et ceux qui refusent la mutation sur un site qui, de toute façon, ne pourra pas accueillir tout le monde, elle promet un licenciement pour faute grave !
Alors, pour dénoncer un licenciement économique déguisé, c’est par la grève qu’ont répondu les travailleurs. Comme le résume l’un d’entre eux : « Le masque tombe. Quand ça allait dans leur sens, pas de problème, ils [la direction] sont avec vous, mais quand vous réclamez un petit truc, ils sont contre vous. » Dès le premier jour de grève, la tension monte. La direction veut interdire aux grévistes de se garer dans le parking de l’usine. « Casse-toi », ordonne-t-elle à un travailleur qui se déclare gréviste. Pour ces salariés « qui ne connaissent rien à leurs droits », l’apprentissage est rapide. Première grève, première visite à l’inspection du travail et premier blocage « qui fait perdre une journée de production » au groupe. Tous y voient « une dignité retrouvée » alors qu’ils « se sont sentis salis, pas respectés » par les menaces de licenciement pour faute grave.
Si les entretiens individuels en vue des licenciements devraient avoir lieu la semaine qui vient, et que c’est sur le terrain juridique que devrait se poursuivre la lutte après un mois de grève2, les grévistes sont loin d’être résignés. Ils tenaient à partager les leçons de leur lutte : « Quand on s’organise, ça fait peur au patronat, qui essaie d’isoler les salariés. » Et si cette soirée et les liens tissés dans la lutte confirment que « les liens entre travailleurs sont naturels », ils permettent de prendre conscience « qu’on est plus nombreux qu’eux » et que « si ça nous convient pas, on s’arrête… Et qu’ils fassent tout tourner, eux ! ».
Correspondant
1 Géant de la logistique avec plus de 38 000 salariés et 400 sites dans 18 pays pour un chiffre s de 2,75 milliards d’euros en 2023.
2 Après avoir reçu des salaires allant de 200 à 500 €, une caisse de grève est ouverte https://www.cotizup.com/greve-id-logistics-13015