
L’entreprise de livraison de repas Frichti est en procès au tribunal correctionnel de Paris du 13 au 21 novembre pour travail dissimulé et emploi illégal d’étrangers en situation irrégulière. Déjà attaquée au conseil de prud’hommes de Paris par 233 anciens livreurs pour travail dissimulé, cinq travailleurs ont vu leur ancien emploi requalifié en CDI à temps plein le 6 novembre. Ces plateformes sont de vrais laboratoires patronaux : plusieurs centaines de livreurs d’autres entreprises équivalentes ont aussi porté plainte.
La petite start-up française a tout d’une grande
Liquidée en 2023, cette entreprise déguisait le salariat en micro-entrepreneuriat, sans contrat, privant les travailleurs de toute protection sociale, alors qu’un lien de subordination juridique existait entre la plateforme et le soi-disant travailleur « indépendant », puisque les livreurs ne pouvaient décider de rien (choix du client, du tarif, du parcours, de la tenue, du label de la marque, etc.). Il existait également un système de sanction pour les livreurs jugés peu fiables. Au final, toutes les chaînes du salariat, sans aucune protection.
Les enjeux du procès
Ce procès, avec la décision du conseil des prud’hommes de requalifier les contrats de cinq anciens livreurs, redonne un peu d’espoir à ces travailleurs. Dans un passé récent, il y a eu en Europe des décisions de justice en leur faveur, reconnaissant par exemple en Italie et en Espagne, le lien de subordination juridique qui existe entre la plateforme et le livreur, requalifiant ainsi des milliers de travailleurs indépendants en salariés. Mais pour la justice en France, c’est encore du cas par cas. Uber Eats et Deliveroo continuent en toute impunité de faire travailler des milliers de livreurs dits « indépendants » sans que la justice n’y trouve pour l’instant grand-chose à redire.
Les livreurs ne peuvent s’appuyer que sur leurs luttes pour obtenir des droits et une protection durables. Et c’est aussi par la lutte de tous les travailleurs et travailleuses que nous pouvons espérer un jour la régularisation de tous ces travailleurs rendus illégaux parce qu’on leur refuse les bons papiers. Il est temps que les capitalistes ne puissent plus profiter de ce système inhumain qui mêle algorithmes, répression et racisme.
Correspondant