En visite en Kanaky, la ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou, a aligné la position du gouvernement sur les demandes des Loyalistes, les colons d’extrême droite, à savoir l’organisation d’une consultation électorale rapide pour faire ratifier les accords de Bougival.
Rappelons que ces accords sont rejetés par les indépendantistes du FLNKS, la principale organisation kanak, dont le président, Christian Tein, remis en liberté dans l’attente du procès déclenché dans le cadre de la répression du soulèvement de l’an dernier, est toujours empêché de retourner dans l’archipel. Ils font la part belle à l’extrême droite caldoche, élargissant la représentation de la Région sud, la plus riche, où les colons sont majoritaires, et, surtout, élargissant le corps électoral dans les élections locales, ce qui avait déclenché le soulèvement de 2024. À l’inverse, les populations kanak n’obtiennent que des mesures symboliques de peu d’incidence, comme la création d’une nationalité « calédonienne », qui viendrait s’ajouter à la nationalité française, ou des représentations diplomatiques directes du territoire, l’État français conservant de toute façon toutes les fonctions « régaliennes ».
Le gouvernement avait décidé de reporter les élections régionales prévues ce mois-ci. C’était une demande de l’extrême droite caldoche qui craignait que la poussée électorale des indépendantistes constatée lors des derniers scrutins organisés librement ne favorise ces derniers. Mais l’élargissement du corps électoral prévu par les accords de Bougival, s’il était appliqué aux élections régionales, favoriserait certainement les colons au détriment des populations kanak. Les pressions du gouvernement, combinées à la répression – la présence de milliers de flics et militaires supplémentaires se fait sentir quotidiennement dans les zones majoritairement habitées par les Kanak – ont divisé le camp indépendantiste : c’est ainsi que le Palika a confirmé sa signature des accords de Bougival, malgré des protestations internes, et a rompu avec le FLNKS.
Naïma Moutchou disait : « Je ne veux pas faire sans le FLNKS. » On voit ce qu’il en est ! L’État français a choisi à nouveau le passage en force, comptant sur la lassitude des populations dans un territoire quadrillé par les forces de répression et dont le délabrement économique touche de plein fouet les Kanak. Mais l’État français ne pourra pas « faire » longtemps sans les Kanak et, plus généralement, sans toute la jeunesse qui avait allumé les feux de la révolte l’an dernier. Les magouilles pour faire régner un ordre colonial inique annoncent des réactions encore plus radicales tôt ou tard.
25 novembre 2025, J.-J. F.