(Slogan pour dénoncer une coupe rase de feuillus en 2021 en Creuse)
Même si un tiers du territoire métropolitain est boisé (17 millions d’hectares), la santé des forêts se dégrade. En Bourgogne-Franche-Comté, le taux de mortalité des arbres a doublé depuis 2015. Les monocultures ont favorisé les ravageurs et les parasites, plus de sécheresses et de vents ont accéléré le dépérissement et diminué la capacité de la forêt à stocker le carbone.
Alors, le gouvernement a lancé un plan pour « aider la forêt à s’adapter au changement climatique ». Sur le terrain, on en mesure l’hypocrisie : le plan de Macron finance la destruction de forêts diversifiées et saines de feuillus pour les remplacer par… une monoculture de douglas (dont un tiers des jeunes plans risquent d’être brûlés par le soleil au premier été sec !). Le douglas, un résineux avant tout adapté aux usages industriels parce qu’il pousse vite et droit.
La demande en bois ne cesse d’augmenter : pour les cartonneries, la fabrication de palettes, pour l’énergie (chauffage bûches, pellets-granulés de bois), la menuiserie et la construction. Sans compter qu’il se prépare une surexploitation des massifs pour fournir des projets industriels démesurés comme les méga-usines à pellets (Jura, Creuse) ou comme la centrale biomasse de Gardanne dans les Bouches-du-Rhône. Le greenwashing peut même aller jusqu’à vouloir produire, dans les Pyrénées, du kérosène pour les avions à partir de la biomasse forestière et du méthanol pour les bateaux !
Les collectifs contre la prédation capitaliste s’organisent
En Limousin, de plus en plus de bois de feuillus sont rasés, jusqu’au bord des cours d’eau. Des habitants, des forestiers et des naturalistes s’en inquiètent. Ils s’organisent, contactent les propriétaires, alertent parc naturel et organismes d’État, préviennent la presse. Ils lancent des actions juridiques et organisent des visites de coupes, réussissant parfois à en bloquer certaines ou à prévenir leur extension. D’autres achètent collectivement des parcelles pour en assurer une gestion durable, écologique. Ces collectifs ont montré comment les subventions du plan de relance « forêt » sont une opportunité pour rentabiliser l’exploitation du bois, le plus souvent au bénéfice de grands propriétaires fortunés ou de compagnies d’assurances. Et au passage, ça profite aux coopératives forestières qui réalisent les coupes et les plantations.

Alors, oui aux éclaircies, mais pas de coupes rases de bois de feuillus : ces bois sont les plus résilients, ils protègent la qualité et la circulation de l’eau et ils abritent une grande biodiversité (oiseaux, insectes, microbiote du sol). Les forêts, ce sont aussi les paysages de notre environnement et des lieux de loisirs (randonnées, cueillettes de champignons…). Plus que jamais, les activités humaines doivent prendre leur juste place en se débarrassant de la prédation capitaliste et en veillant à l’équilibre de nos forêts.
Élise Moutier
À voir : « Le temps des forêts » (2018) de François-Xavier Drouet

Un documentaire pour comprendre l’évolution des forêts depuis 50 ans à travers des reportages dans le Morvan, les Landes, les Vosges et le Limousin. On y découvre que l’industrialisation de la sylviculture avance à grand pas : monocultures, pesticides, mécanisation lourde. Face à cette exploitation intensive du bois, des témoignages nous montrent pourquoi il est vital de garder une forêt vivante.
Sommaire du dossier
- Un petit geste pour la planète, renverser le capitalisme !
- Le marxisme : un outil écologique
- Crise écologique : que dit la recherche scientifique ?
- « Transition verte », « solutions technologiques », disent-ils. Surtout gros profits !
- « L’écologie sans lutte des classes, c’est du jardinage ! »
- « La filière bois – la forêt trinque ! »
- Industrie du bois : Ikea, l’art du greenwashing et de l’auto-certification
- Trump en guerre contre l’écologie
- Moins ! La décroissance est une philosophie, de Kohei Saito
- Premières secousses, par Les Soulèvements de la Terre
- Overshoot : How the World Surrendered to Climate Breakdown, d’Andreas Malm
- White Skin, Black Fuel: On The Danger Of Fossil Fascism, d’Andreas Malm
- La chauve-souris et le capital : stratégie pour l’urgence chronique, d’Andreas Malm