Nos vies valent plus que leurs profits

La guerre qui est à nos portes est la guerre sociale !

Dans une interview diffusée mardi 25 novembre sur RTL, Macron est revenu sur les propos du général Fabien Mandon, qui avait affirmé au congrès des maires de France que nous devions être prêts à « perdre nos enfants » et à « souffrir économiquement ». Dispendieux avec la vie des autres, ce monsieur, et ignorant que près de dix millions de personnes vivent en France sous le seuil de pauvreté – et bien davantage « souffrent » déjà économiquement ! Macron prétend que les propos ont été sortis de leur contexte et qu’« il ne faut pas expliquer à tous les Français qu’on va les sacrifier ». Pas tous donc, mais certains… Et il a tout de même l’intention d’envoyer des soldats français sur la frontière entre la Russie et l’Ukraine pour garantir l’accord de paix, lorsqu’il serait trouvé.

La guerre est-elle à nos portes ?

Avant la fin de la guerre froide au début des années 1990, « l’ennemi » était déjà à l’Est et tous les troufions, avant que le service militaire ne soit supprimé, avaient droit aux discours sur l’ennemi communiste, l’URSS expansionniste qu’il fallait contenir et se préparer à abattre dans une inévitable troisième guerre mondiale. Comme quoi, ce ne sont pas les déclarations des dirigeants qui suffisent à annoncer les guerres.

Il est clair que les États-Unis n’avaient pas attendu Trump pour déclencher une guerre commerciale, en particulier avec la Chine. Mais, entre une guerre commerciale et une guerre tout court, il y a de nombreuses évolutions possibles. Alors, bien entendu, personne ne peut exclure que la montée des bruits de bottes dans le monde ne soit le prélude de véritables guerres entre grandes puissances, d’autant que, des guerres, il y en a pas mal sur la planète, de l’Ukraine au Darfour, en passant par le Moyen-Orient. Mais les affirmations sur l’éclatement d’une guerre avec la Russie au début des années 2030 tiennent davantage de l’horoscope que d’une analyse de la situation.

Quels sont les buts de Macron et Mandon ?

En réalité, on reste très loin des niveaux de production d’armement de l’époque de la guerre froide. Mais l’augmentation des dépenses militaires est tout de même considérable. Leur usage dépend du niveau de concurrence et de crise entre les différents impérialistes, imprévisible pour l’instant. Leur usage contre les peuples, pour le pétrole du Moyen-Orient ou les minerais d’Afrique est lui une constante. Et la dynamique de cette augmentation des dépenses militaires est, en elle-même, un problème. Sans revenir sur le fait qu’on ne peut évidemment exclure un dérapage guerrier, ce qui est prévisible à coup sûr, ce sont les attaques que cela annonce pour les classes populaires. Le budget militaire est le seul qui n’est pas rogné et cela avec l’assentiment de tous les partis représentés à l’Assemblée, du Rassemblement national à La France insoumise.

Outre leur fonction militaire, les armes ont une fonction économique : ce sont des commandes directes à l’industrie qui boostent les profits des Dassault et autres Airbus Defence and Space. Des profits qui « ruissellent » sur de nombreux sous-traitants capitalistes. D’autant que les armes produites ont un énorme avantage sur d’autres marchandises : elles sont vite obsolètes, même si elles n’ont pas servi, parce que « ceux d’en face » en ont sorti de nouvelles…

Mais il y a plus. Les déclarations de Mandon ne traduisent pas seulement les choix économiques de la bourgeoisie. Après trente-cinq ans du « pacifisme » qui a suivi la chute de l’URSS, il s’agit de faire prospérer un patriotisme guerrier, ne serait-ce que pour justifier la reprise de la production militaire en désignant « l’ennemi ». L’armée est très efficace dans le bourrage de crâne patriotique : il y a une reprise en main idéologique du discours dominant qui se traduira inévitablement par des restrictions des libertés démocratiques – on le voit déjà dans la chasse à ceux qui soutiennent les Palestiniens contre le génocide perpétré par l’État d’Israël.

Il n’est jamais rassurant de confier des joujoux capables de vitrifier la planète à des gens comme Macron, Mandon et, surtout, Trump et Poutine ! Mais s’il y a une guerre à laquelle nous devons nous préparer tout de suite, c’est la guerre sociale que nous déclarent les classes dirigeantes. Les travailleurs disposent déjà d’une première arme : comme c’est nous qui faisons tout, nous pouvons tout bloquer !

25 novembre 2025, Jean-Jacques Franquier