Extraits de l’intervention de notre camarade Damien Scali, au forum que nous avons tenu à la fête de LO
Pour beaucoup ici et dans le pays, le NPA est associé à Philippe Poutou. Et jusqu’à présent, nous étions plutôt fiers d’être identifiés par un porte-parole ouvrier, reconnu par de nombreux travailleurs comme révolutionnaire. Mais depuis son cinquième congrès, en décembre 2022, les choses ont changé. Philippe Poutou et ses camarades, parce qu’ils n’ont pas réussi au congrès de leur parti à obtenir une majorité en soutien à leur politique d’alliance avec la Nupes, puis en faveur d’un rapprochement avec la FI, ont décidé de quitter le congrès. Nous sommes le NPA qui l’a continué, a refusé ce choix de courir derrière la gauche soi-disant radicale, un NPA révolutionnaire, du nom justement du journal que nous avons lancé (…), qui a eu les deux pieds dans le dernier mouvement social d’ampleur que nous venons de connaître (…), qui est fort de centaines de militants, jeunes, travailleuses et travailleurs de différents secteurs, santé, cheminots, RATP, Poste, industrie automobile, chimie, etc.
C’est ce NPA qui est ici, à la fête de LO, le seul qui a tenu à être présent (…)
Il y a un mois environ, nous avons rencontré les camarades de Lutte ouvrière, à notre demande, en vue de la fête actuelle et pour exposer cette situation nouvelle. La question qu’ils ont soulevée : puisque vous vous revendiquez être le NPA, assumez-vous son héritage politique ? Il est toujours délicat de parler d’héritage entre révolutionnaires qui militent pour abolir la propriété privée. Par ailleurs, notre volonté est de démontrer dans les faits, par notre pratique militante, l’orientation que nous portons, bien plus que par un pedigree politique tourné vers le passé. Mais pour faire une réponse, c’est très simple : nous sommes les héritiers des bagarres politiques que nous avons menées au sein du NPA. Et nous l’assumons pleinement et avec fierté. (…) Notre NPA est donc le produit de ce refus intransigeant de filer le train à la « gauche de la gauche » à quelque occasion que ce soit. Mais aussi de la volonté de militer avec d’autres révolutionnaires dès lors que des bases politiques minimum d’indépendance de classe sont réunies. (…)
Car même si nous avons toujours le même nom que celui sous lequel nous avons milité durant la dernière décennie, tout a d’ores et déjà complètement changé pour nous depuis quelques mois. Nous sommes en train de construire une nouvelle organisation. Une organisation qui se donne comme objectif de long terme de contribuer à la construction d’un parti des travailleuses et des travailleurs, communiste, révolutionnaire et internationaliste comme notre journal l’indique.
Une fois cet objectif proclamé, comment comptons-nous nous y prendre ? Je me contenterai d’évoquer trois pistes, parmi les plus essentielles.
1) Notre but est de faire vivre les idées révolutionnaires directement au sein du prolétariat. (…) La confusion ou le désintérêt politique y côtoient la montée des idées d’une extrême droite qui se prétend le premier parti ouvrier du pays. Mais cela se couple avec une politisation d’une partie du prolétariat qui, même confusément, cherche les voies et les moyens de sa propre émancipation. (…)
2) Nous combattons aussi pour une politique permettant aux travailleurs de prendre en main leurs propres mouvements, y compris les grèves, dès lors qu’ils se mettent à contester le pouvoir du patronat ou de l’État à leur service. Assemblées générales de grévistes, comités de grève démocratiquement élus par les travailleurs eux-mêmes sont des organes ouvriers encore bien trop rares dans les luttes d’aujourd’hui. (…)
3) Un certain enthousiasme nous anime, en toute modestie bien sûr ! Car nous avons la prétention de ne pas bluffer dans la tentative que nous faisons. Nous ne sommes pas en train de proclamer une nouvelle organisation, mais de la construire. (…) Plutôt que chacun des courants qui sont à l’origine de notre NPA (…) se disent « c’est autour de moi que ça se fera » (…), nous disons au contraire : on va fusionner nos courants pour construire une organisation qui sera plus forte, plus implantée, plus vivante. (…) C’est aussi le melting pot nécessaire aux confrontations politiques, programmatiques et pratiques sans lesquelles aucun parti révolutionnaire ne verra jamais le jour.
L’effervescence sociale inédite que nous venons de connaître vient d’offrir de nouveaux défis à nos organisations révolutionnaires, dans un contexte où toutes recrutent politiquement dans les classes populaires, et particulièrement dans la jeunesse étudiante et prolétarienne. (…) Nous sommes loin encore d’avoir réussi notre pari, on a bien des problèmes à résoudre, mais on est enthousiastes, car on a la prétention de tenter de poser de manière un peu nouvelle la question de l’unité des révolutionnaires dans ce pays. Pas en la proclamant, mais en la tentant. Pas aussi à chaud qu’après Mai 68, quand Lutte ouvrière avait fait sa proposition de parti commun à tous les « gauchistes ». Mais bel et bien avec ce même état d’esprit. Et puisqu’on discutait « d’héritage politique », alors disons que nous sommes fiers de nous réclamer également de celui du courant LO de ces années-là.
(Article paru dans Révolutionnaires numéro 3, été 2023)