
Le NPA-Révolutionnaires a été invité à participer du 22 au 26 août au camp organisé par le SEP (Sosyalist Emekçiler Partisi, Parti socialiste des travailleurs), une organisation trotskiste de Turquie. Ces quatre jours riches en discussions nous ont permis de tisser des liens avec les camarades du SEP et de comprendre un peu mieux la situation sociale et politique dans la Turquie d’Erdoğan.
La Turquie après un an de mobilisation massive
Ces derniers mois en Turquie avaient été marqués par une forte mobilisation contre l’autoritarisme croissant du régime. Suite à l’arrestation le 19 mars du maire d’Istanbul, principal opposant d’Erdoğan, une vague de manifestations massives a balayé le pays pendant plusieurs semaines.
Les étudiants ont été la force motrice de la mobilisation. Ce qui s’explique aisément quand on constate à quel point les perspectives sont bouchées pour la jeunesse de Turquie. Pour accéder à un poste dans l’enseignement ou dans la fonction publique, il faut non seulement faire profil bas et se garder d’émettre publiquement toute critique du régime, mais il faut également de plus en plus savoir à qui graisser la patte pour avoir le poste. Ceux qui ont un bon réseau peuvent même directement acheter leur diplôme, comme ces hommes d’affaires qui cumulent doctorats en droit, en mathématiques et en lettres… On comprend que parmi les huit millions d’étudiants que compte le pays, nombre d’entre eux commencent vraiment à se demander ce qu’ils ont à perdre à devenir des dissidents.
Si les vacances universitaires ont bien ralenti le rythme des mobilisations, rien ne dit que de nouveaux soubresauts n’auront pas lieu à la rentrée. Dans bien des facs l’ambiance a changé et on commence tout juste à faire ouvertement de la politique. Qui plus est, la dictature d’Erdoğan n’est pas le seul élément qui suscite de la colère dans la population. L’inflation, qui atteint actuellement les 33 %, fait des ravages dans le pays et a des conséquences visibles. Les restaurateurs sont contraints de diminuer la quantité de viande dans leurs kebabs !
Militer sous la dictature
La répression constitue un autre obstacle de taille à l’activité révolutionnaire en Turquie. Les camarades du SEP sont bien placés pour le savoir : en décembre dernier, Erdoğan avait fait arrêter et placer en détention 19 d’entre eux sous de fausses accusations de terrorisme. C’était quelques semaines avant qu’il ne fasse arrêter le maire d’Istanbul, son principal opposant politique, élément déclencheur des premières manifestations. Libérés au bout de quatre jours de détention, les camarades ont encore dû faire face à des mesures de contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence. Aujourd’hui encore, ils ignorent quand leur procès aura lieu (et s’il aura lieu un jour, tant il est évident que les charges qui pèsent contre eux sont montées de toutes pièces).
Si la répression n’est pas une nouveauté, c’est la première fois qu’Erdoğan vise aussi directement des organisations socialistes. Cette pression pose bien sûr des difficultés pour l’activité militante quotidienne et les camarades savent que ce n’est peut-être qu’un début. Dans ce combat face au régime, nous leur exprimons bien sûr toute notre solidarité !
Un camp d’été réussi
Cette année, le camp d’été du SEP a fait le plein de sympathisants et de militants. Sous le soleil écrasant d’Antalya (mais heureusement avec la mer pas très loin !), les discussions furent riches. Avec des exposés : sur la situation politique en Turquie, la construction léniniste du parti, la question nationale… Un débat sur la situation internationale que nous avons animé avec les camarades en présentant le cas de la course à l’armement en Europe et en France. Et aussi de nombreux ateliers sportifs, artistiques et culturels.
Ces quelques jours passés ensemble nous ont permis de tisser des liens précieux que nous sommes bien décidés à faire vivre dans le futur. Merci aux camarades du SEP pour leur accueil et à très vite, en Turquie ou ailleurs sur la planète.
Martin Duquesne