Les calculs sont pas bons Jeannot !
Alors que l’inflation continue de grimper en particulier sur les prix alimentaires, nos salaires eux continuent de baisser, relativement. Et ce ne sont pas les accords signés l’an dernier qui ont permis de changer l’état des choses.
En effet, depuis le 1er janvier, les conducteurs et conductrices de bus de la RATP auraient reçu une augmentation de salaire de 370 euros bruts par mois. Les patrons du transport auraient-ils enfin cédé, sans grève aucune, à la revendication urgente des 400 euros de plus pour tous et toutes et plus aucun revenu en dessous de 2 000 euros ?
Sans grande surprise, cette « augmentation » n’en est pas vraiment une… Démonstration !
Alors que toutes les entreprises du transport se préparent à l’ouverture à la concurrence, la RATP a revu à la baisse les conditions de travail à bus. Dans le nouveau « Cadre social territorialisé » qui réglemente le travail des conducteurs et conductrices à Paris et dans sa petite couronne, ce n’est pas moins de 120 heures en plus par an qui sont venues s’ajouter au temps de travail en coupant dans les jours de repos, en augmentant l’amplitude de service et en multipliant les services en deux fois pouvant aller jusqu’à 8h30 de temps de travail effectif.
Et pour comprendre la petite cerise (ou carotte…) qui s’ajoute sur le gâteau, il faut regarder de plus près ce qui se cache derrière ladite augmentation. Sur les 290 euros nets promis, les conducteurs n’ont en réalité été augmentés que de 80 euros. Le reste ? Des primes déjà perçues qui ont été intégrées au salaire (prime qualification/pénibilité, prime accident, etc.) ou supprimées comme la prime « coupure » et 160 euros pour « compenser l’augmentation du temps de travail ».
Cette soi-disant augmentation de salaire est donc en fait bien plus une attaque contre les travailleurs et travailleuses, qui vise à tirer les conditions de travail de l’ensemble des conducteurs du pays… toujours vers le bas. Le but de la direction est en effet de s’attaquer par tous les bouts aux réglementations du temps de travail pour intensifier l’exploitation. Cette nouvelle offensive nous rappelle que pour nos salaires et nos conditions de travail, nous n’aurons rien que nous n’irons pas chercher par nous-mêmes. Et tant qu’à faire, pendant qu’ils préparent leur ouverture à la concurrence, préparons notre unité, celle de tous les travailleurs du transports et au-delà, pour une augmentation générale de nos revenus et le partage du temps de travail entre toutes et tous. Ces revendications sont celles de l’ensemble du monde du travail et donc des machinistes et mainteneurs des transports. Les mettre en avant est la seule façon d’en appeler à une bataille générale et de la gagner, à l’inverse de ce que cherchent les directions patronales (et bien souvent syndicales) qui divisent et appuient le « boîte par boîte ».
Last but not least, les nouveaux embauchés à la Régie, après le 1er janvier, n’ont évidemment pas eu droit à cette non-augmentation. À cela s’ajoutent les différents statuts. C’est contre toutes ces divisions organisées par en haut qu’il faut qu’on réponde par nos revendications communes. Après la découverte du nouveau job, vient celle des luttes !
Mathilda Nallot
La vie d’un atelier de maintenance de la RATP
Là où bossent les mécaniciens, les « parents pauvres » de la RATP, le combat c’est avant tout de donner confiance en eux aux collègues. Pour l’instant, c’est la course pour pas finir trop sur le carreau à la fin du mois. Alors, ils viennent bosser le week-end ou font tout pour prendre un deuxième job. Certains sont convaincus que c’est par la grève qu’on obtiendra des salaires meilleurs, et donc de meilleures conditions de vie, c’est le cas de Silvatan* par exemple. Il vit dans un trois pièces, il y a sa mère qui touche le minimum vieillesse, son père et sa retraite de misère, sa fille, sa femme enceinte et lui. Il est de toutes les grèves, mais il vient bosser le samedi, même en sachant qu’il se tire une balle dans le pied. Mokhtar, un jeune de vingt-trois ans répète à longueur de journée qu’il n’en peut plus du taff. Le matin bien avant l’aube et jusque tard dans la nuit il conduit un van, au black, pour arrondir les fins de mois. Dix euros de l’heure ! Alors oui, il bosse lui aussi en heures supp’ quand les chefs le lui proposent, ça semble bien payé en comparaison. Julien, un hyperactif qui cavale dans les travées, lui, ne fait pas toutes les heures supp’… parce qu’il refait les cuisines et les salles de bain des voisins pour un petit billet. Et des gars dans leur situation, il n’y a quasiment que ça dans la boutique. Et puis il y a ceux qui s’en vont avec des rêves d’avenir meilleur. Pour monter leur boîte ou voir si l’herbe est plus verte ailleurs.
Les bagarres des années précédentes ont créé ici et là une solidarité entre nous, un collectif sur lequel il faut nous appuyer pour gagner cette bataille des salaires et de nos conditions de travail.
Correspondants
* Les prénoms ont été modifiés