Nos vies valent plus que leurs profits

Souveraineté nationale ou indépendance de classe ?

« Opposer des droits de douane européens aux droits de douane fixés par le président américain est inefficace » (Jean-Luc Mélenchon, le 8 avril). « La hausse massive des tarifs douaniers pourrait entraîner une hausse importante des prix à la consommation » (sur le site de la CGT, le 20 janvier). La gauche qui, depuis plus de dix ans, a fait du protectionnisme sa boussole économique, serait-elle désorientée par la politique douanière de Trump ?

Difficile pour elle de s’en distinguer sans se renier complètement. C’est donc l’heure des nuances : le protectionnisme de Trump est « barbare et sauvage » (Manuel Bompard), celui de la gauche serait « solidaire ». Comme il y a le bon et le mauvais chasseur, il y a le bon et le mauvais protectionnisme. Pas question pour Mélenchon de taxer les produits à l’aveugle, il faut taxer les profits des géants américains de la tech… Mais, au bout du compte, c’est toujours sur les prix de vente que risquent de se reporter ces impôts supplémentaires !

Si la gauche est gênée, c’est que les illusions pourraient se dissiper. Trump, milliardaire d’extrême droite, gouverne pour le capital américain. Son protectionnisme cherche à défendre le patronat de son pays dans la concurrence internationale. Un protectionnisme, même « de gauche », même de ce côté-ci de l’Atlantique, n’aurait pas d’autre fonction, et les travailleurs n’auraient rien à y gagner. Combien de subventions publiques et de sacrifices sociaux faudra-t-il par exemple consentir pour faire accepter aux patrons français la fameuse réindustrialisation ?

Même français, les patrons restent des patrons, ils ne comprennent que la lutte des classes. Partis et syndicats tentent de nous convaincre du contraire, et de les convaincre qu’une gauche responsable serait un atout. « Le patriotisme économique, c’est nous qui le portons », a ainsi déclaré Sophie Binet avant de se porter candidate à une hypothétique « cellule de crise » tripartite pour riposter aux annonces de Trump. Ce sera sans nous !

Bastien Thomas

 

 


 

 

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