Nos vies valent plus que leurs profits

Du NPA aux « Forums » pour construire un nouveau parti

De la suite dans les idées ou dans la dérive

Comme une partie de nos lecteurs et lectrices le savent probablement, une scission dans le NPA intervenue à l’occasion de son dernier congrès de décembre 2022, a entraîné une moitié de l’ancienne organisation, derrière ses porte-parole Philippe Poutou, Olivier Besancenot et Christine Poupin, vers une politique nettement assumée d’alliances avec la gauche radicale, dont une partie milite avec la FI, voire la Nupes. Les extraits de notre intervention à la fête de Lutte ouvrière, publiée ci-contre en page 15, rappellent les raisons politiques de cette scission. L’évolution des camarades qui ont suivi Philippe Poutou est rapide. Leurs liens politiques tissés avec la FI sont multiples. À leur agenda, le 7 juillet prochain, un « Forum des anticapitalistes » sur lequel nous nous exprimons ci-dessous… certes avant qu’il se tienne, mais au vu et lu du projet et de la liste des signataires de l’initiative.

Déjà en 2020…

« Les organisations de gauche, même radicales et anticapitalistes, sont en crise […] . C’est pourquoi nous voulons commencer à créer, dès maintenant, une nouvelle organisation politique », écrivait en novembre 2020 l’appel « Rejoignons-nous ». Il avait été signé par quelques militants issus du PCF, dont l’ancien député Pierre Zarka, des militants syndicaux, d’ex-militants du NPA l’ayant quitté depuis plusieurs années et une poignée de militants toujours au NPA, dont l’une de ses porte-parole. Les mêmes qui pour l’élection présidentielle s’étaient prononcés pour que le NPA ne présente pas de candidat à la présidentielle de 2022. Leur signature de cet appel à créer un nouveau parti avait suscité à l’époque des oppositions dans le NPA, y compris parmi ceux qui étaient de la même tendance que des signataires.

Aujourd’hui, l’appel au Forum du 7 juillet annonce…

« Les organisations actuelles ne suffisent pas et nous avons besoin de nous organiser davantage, de nous réunir pour construire, à terme, une nouvelle force démocratique et pluraliste, pour la justice, l’égalité et la démocratie, pour les solidarités internationales […] Cette organisation politique pourra être présente dans l’arène électorale et institutionnelle. […] Ce forum sera une première étape qui doit nous permettre de débattre ensemble des contours d’une nouvelle organisation à construire », « Organisons-nous pour construire l’alternative. »
Aux côtés des mêmes ex-PCF, d’Ensemble et d’autres petits courants, des dizaines de signataires du nouvel appel affichent l’étiquette NPA, dont Philippe Poutou, Olivier Besancenot et une partie de l’ancienne direction du NPA, celle qui a quitté le congrès de décembre dernier « pour pouvoir travailler avec la FI ».

« Rejoignons-nous » a donc été rejoint !

Et vogue la galère pour la naissance d’un nouveau parti ? Première escale annoncée, les élections européennes de juin 2024 ? L’idée des signataires, telle qu’exprimée dans la revue L’Anticapitaliste1, est que le NPA serait un échec, n’ayant pas réussi à créer un grand parti regroupant révolutionnaires et anticapitalistes au sens large. La laine lui aurait été mangée sur le dos par « la rupture de Mélenchon avec le social libéralisme », qui a attiré à lui « le milieu radicalisé ». L’échec du NPA aurait été de ne regrouper que des militants révolutionnaires différentes, y compris venus de tendances d’origines trotskystes.

Pour nous, plutôt un succès d’avoir résisté à cette évolution !

Et un succès d’avoir attiré à notre NPA, qui a résisté aux sirènes de la gauche, dans les derniers mouvements sociaux comme lors que la campagne électorale de Philippe Poutou, de nombreux jeunes, attirés par les idées révolutionnaires plutôt que par des alliances électorales avec la Nupes et ses péripéties politiciennes. Pour changer le rapport de force en faveur du monde du travail, pour lutter contre la progression des idées d’une extrême droite qui profite de la dégradation de la situation sociale pour distiller sa xénophobie au nom du protectionnisme économique (que la gauche, même mélenchoniste, encense aussi), il n’y aura de décisif que le terrain des luttes. Et quand on regarde le monde, cette guerre d’Ukraine en Europe, cette colère sociale qui monte en Amérique latine, au Soudan ou au Sénégal, c’est un parti révolutionnaire qu’il nous faut, et non une « gauche de la gauche ».

C’est à cette tâche que s’attelle le NPA, celui qui continue.

Olivier Belin

 

 

(Article paru dans Révolutionnaires numéro 3, été 2023)

 

 

1  Manu Bichindaritz, « Des forums anticapitalistes pour débattre, dépasser et construire », Revue L’Anticapitaliste n°146 (mai 2023)