Un projet de loi de finances du gouvernement prétendait imposer des augmentations brutales de taxes visant les classes pauvres, comme une TVA de 16 % sur le pain ou une taxe annuelle de 2,5 % sur les voitures particulières. Il s’agissait de récupérer l’équivalent de 2,5 milliards d’euros sur le dos des couches populaires dans l’objectif de rembourser une dette extérieure qui étrangle le Kenya.
Ce projet a déclenché au mois de juin une vague de manifestations répétées de plusieurs dizaines de milliers de personnes dans tout le pays, et particulièrement dans la capitale, Nairobi. La répression, féroce – près de 40 morts et des centaines de blessés, sans doute beaucoup plus en réalité – n’a rien pu y faire : le 25 juin, le pays était paralysé et les manifestants envahissaient le Parlement, obligeant les députés, qui venaient de voter la loi, à détaler par des tunnels. Le lendemain, le président, William Ruto, a été contraint de modifier ses plans : « Après avoir écouté attentivement le peuple kényan […] je m’incline et je ne promulguerai pas le projet. »
Le gouvernement semble vouloir reprendre la main en annonçant des mesures d’austérité contre les fonctionnaires et, tant qu’elle n’est pas abrogée, la loi de finances peut toujours s’appliquer, même si elle n’est pas promulguée par le président. Toutefois, ce recul du pouvoir reste une première victoire arrachée par la rue et une mobilisation profonde et résolue qui met la population en position de force.
Michel Grandry