Nos vies valent plus que leurs profits

TER : la concurrence est sur les rails, mais lesquels ?

Le train express régional n° 17483 du lundi 30 juin est arrivé à son terminus 25 minutes après l’heure prévue. Ce retard ne mériterait pas d’être relevé s’il n’avait pas concerné le voyage inaugural de la ligne Marseille-Toulon-Nice, exploitée non plus par la SNCF mais par Transdev, avec à son bord le PDG de la société et le « patron » macroniste du conseil régional de Paca, Renaud Muselier. Digne successeur de Christian Estrosi, ce dernier avait multiplié les promesses que la concurrence et le privé feraient mieux que la SNCF.

Les subventions publiques du conseil régional pour l’exploitation de cette ligne ferroviaire sont en effet d’un autre niveau que du temps de la SNCF : 120 millions d’euros supplémentaires (un budget en hausse de 14 %) auxquels il faut ajouter 250 millions d’euros pour l’achat de 16 rames neuves auprès d’Alstom dont les retards de livraison pour moitié d’entre elles ont poussé Transdev à louer des rames… à la SNCF. Las de reconnaître que tout est question de moyens financiers, Renaud Muselier a déjà mis toutes les chances de son côté de pouvoir annoncer que « le privé fait mieux » par un bidouillage statistique : Transdev ne se verra pas imputer les retards dus à des pannes d’infrastructure ferroviaire. Possible dès lors d’atteindre l’objectif affiché de 97,5 % de ponctualité sur les trains : avec les mêmes critères, la SNCF faisait 96%, alors qu’en fait Marseille-Nice était une des lignes TER les moins fiables du pays avec un taux de ponctualité avoisinant les 80 %.

Toute cette mauvaise foi prêterait à rire si elle n’était pas au service d’un discours patronal : d’après le président de la région Paca, si l’avenir de la ligne s’annonce radieux, c’est parce que les cheminots du « privé » coûteraient moins cher qu’un agent SNCF au statut. Des dirigeants de la SNCF abondent : « Un cheminot à la SNCF est entre 10 à 15 % plus cher que chez nos concurrents. Si nous ne faisons rien, nous perdrons tous les marchés. » Pour le moment, sur dix appels d’offres TER, les filiales SNCF et leurs objectifs de réduction du « coût du travail » en ont remporté sept… Quelle que soit la couleur politique du conseil régional ou le fronton de l’entreprise, qu’ils soient déjà dans une filiale ou futurs filialisés, seules les luttes et les grèves des cheminots pourront contrecarrer l’offensive patronale dénommée « ouverture à la concurrence » sur leurs rémunérations et conditions de travail.

8 juillet 2025, Correspondants