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Puces électroniques et métaux rares : nouvelle étape de la guerre commerciale

Le gouvernement néerlandais, en mettant la main sur le fabricant de puces Nexperia (entreprise néerlandaise devenue propriété du groupe chinois Wingtech depuis 2019), a relancé la guerre commerciale. Cette mise sous tutelle de l’entreprise s’est faite sous la pression des États-Unis, européens et américains craignant que Wingtech ne siphonne les finances et les technologies de Nexperia. Ce transfert de l’Europe vers la Chine aurait visé à accélérer le rattrapage de son retard par rapport aux fabricants et concepteurs sud-coréens, taïwanais, japonais (participants à l’alliance Chip 4 depuis 2023 avec les États-Unis, visant à isoler la Chine) et américains sur les puces électroniques les plus avancées, essentielles pour les nouvelles technologies et l’industrie de l’armement.

Xi Jinping a alors riposté en bloquant les exportations des puces Nexperia et en imposant désormais à toutes les entreprises utilisant des métaux rares chinois de devoir demander l’autorisation de la Chine pour les obtenir. Elle contrôle 70 % de l’extraction et 90 % du raffinage, ce qui lui donne un moyen de pression particulièrement efficace. Non content de fabriquer de nombreux produits à forte valeur ajoutée grâce à ces métaux rares, l’impérialisme chinois commence à avoir les moyens de résister face aux menaces de Trump et même d’attaquer ses concurrents. Quitte à rajouter un peu plus de chaos dans l’économie mondiale à celui déjà créé par la politique protectionniste de Trump. Au vu de sa domination dans ce secteur, la Chine cherche à faire ressurgir la menace de ruptures de chaînes d’approvisionnement, qui se multiplient depuis quelques années (notamment depuis le Covid avec l’épisode de la pénurie de puces électroniques) pour les capitalistes occidentaux, et ce dans des secteurs stratégiques pour la bourgeoisie. La tech a besoin des métaux rares pour la fabrication des composants électroniques, et c’est aussi la sueur et le sang de travailleurs surexploités, notamment au Congo, qui rendent possibles les profits insolents d’Apple ou de Tesla, ainsi que la fabrication des modèles dernier cri des industriels de l’armement. La transition énergétique, que ce soit les automobiles électriques ou les infrastructures des énergies renouvelables, a besoin de métaux rares, dont l’extraction est pourtant extrêmement polluante.

Les États-Unis ont renchéri en annonçant des tarifs douaniers de 100 % envers la Chine. Les États-Unis souhaitent gagner en autonomie vis-à-vis de la Chine, notamment en cherchant de nouvelles filières d’approvisionnement et en mettant les puissances impérialistes de seconde zone en ordre de bataille. Il vient d’imposer à l’Australie un traité commercial très favorable aux capitalistes américains sur les métaux rares et de nombreux autres domaines d’activité. Après avoir réussi son chantage sur l’Ukraine (les États de l’UE ont accepté de réduire les importations de gaz russe en échange d’aide militaire américaine), Trump peut exiger des États européens de mettre en place leurs propres filières. Pour financer une production à hauteur des besoins de l’industrie, les capitalistes comptent sur leurs États pour exiger des milliards de subventions publiques… qui seront très probablement financées par des coupes d’austérité dirigées contre les classes populaires.

Si la Chine et les États-Unis sont parvenus après leur rencontre le 30 octobre à un accord, celui-ci n’est qu’une trêve : si la Chine renonce à ses mesures d’interdiction des terres rares, il ne s’agit que d’une suspension pour un an. Et quelques jours après la baisse des droits de douane décidée par Trump, le secrétaire au Trésor américain Scott Bessent dénonçait la Chine comme un partenaire « peu fiable » et l’accusait d’avoir pris le contrôle du marché, en faisant planer la menace d’une augmentation des droits de douane. Ce contexte international tendu sera le prétexte à de nombreuses attaques, et pas que contre les travailleurs des mines : suppressions de postes, chômage partiel imposé payé avec l’argent de l’État dans certains secteurs (comme aujourd’hui l’automobile) mais aussi une augmentation des prix sur de nombreux produits. Quoi qu’en disent les démagogues nationalistes, les principaux perdants de ce conflit seront les travailleurs.

Robin Klimt