Les associations et les fondations sont-elles exemptes de toute imbrication avec les profits économiques ? Légalement oui. La différence entre les deux se situe sur les statuts juridiques et leurs modes de gouvernance, mais les associations et les fondations sont à but non lucratif, contraintes de ne générer aucun profit.
Pourtant, plusieurs exemples montrent comment ces structures peuvent être mises à profit par des groupes capitalistes, notamment via le mécénat, et comment les questions des profits sont détournées, subtilement ou pas.
L’association de protection de l’enfance Im’pactes a répondu récemment à des appels à projet de conseils départementaux sur le versant de l’insertion scolaire et professionnelle pour les jeunes de l’Aide sociale à l’enfance. À y regarder de plus près, on s’aperçoit que son conseil d’administration est présidé par une ancienne DRH de grands groupes comme Bouygues et L’Oréal, et qu’il compte parmi ses membres Bruno Le Maire, ancien ministre de l’Économie. Parmi ses membres fondateurs se trouvent Accor, le fonds Axa pour le progrès humain, le Crédit mutuel, Vinci, la BNP Paribas, L’Oréal, et une convention est passée entre l’association et le Medef.
De son côté, l’association Plateforme du quai de la Borde, qui a les mêmes missions, a été fondée, entre autres, par Pascaline Mulliez, dont la famille possède le groupe Auchan et compte parmi les plus grandes fortunes de France.
Ces groupes capitalistes qui se gavent de profits en exploitant leurs salariés, qui licencient massivement (Auchan a fermé des magasins dans 19 villes de France en 2025), seraient-ils devenus altruistes ?
En plus d’être des opérations de com’ pour tenter de redorer leur blason par leurs « bonnes œuvres », on peut soupçonner ces associations d’aide à l’insertion professionnelle de fournir de la main-d’œuvre jeune et bon marché à leur business. Mais pour les capitalistes, investir dans des associations et des fondations, c’est avant tout une opération de défiscalisation et d’investissement immobilier !
La loi du 1er août 2003, relative au mécénat, aux associations et aux fondations, a facilité cette combine. Si bien que depuis environ quinze ans, les dons déclarés par les entreprises à l’impôt sur les sociétés au titre du mécénat ont plus que doublé pour atteindre 2,6 milliards d’euros, et le nombre d’entreprises concernées a presque triplé. Sur Internet, on trouve d’ailleurs facilement des conseils sur la meilleure façon d’investir dans des fonds de dotation pour éviter de payer l’impôt sur la fortune immobilière !
Mais on ne peut pas parler de la rentabilité et des profits sur la solidarité sans évoquer le Groupe SOS, multinationale du social, qui regroupe des associations et entreprises à but non lucratif, et se crée un empire dans le secteur en « rachetant » toutes les petites associations en perte de vitesse financière. Un laboratoire de la financiarisation du secteur, à la tête d’un patrimoine immobilier de plusieurs centaines de millions d’euros.
Encadrement législatif ou pas, rien n’est épargné par la loi du profit.
Flora Morand
Budget 2026, austérité, capitalisme : quelle place pour la solidarité dans le secteur associatif ? — Sommaire du dossier paru dans Révolutionnaires no46
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