Nos vies valent plus que leurs profits

Italie : des tentes aux barricades ?

La « protesta delle tende » (protestation des tentes) s’étend dans de nombreuses villes d’Italie. Pour protester contre les loyers élevés, des étudiants et étudiantes ont installé leurs tentes devant les universités. Partie de Rome, la contestation a gagné Milan, Bologne, Naples, Padoue, Florence, Cagliari, Pérouse, et autres…

Dans la plupart des grandes villes, trouver un logement est devenu un privilège, le nombre de places dans les résidences universitaires est insuffisant, et pour les plus modestes, les bourses d’étude ne permettent pas de payer le montant du loyer (de 400 ou 500 euros, voire plus). Après les cours, beaucoup doivent donc travailler, au noir, dans des emplois sous-payés.

Le gouvernement d’extrême droite de Meloni vante les mérites de la sélection. Le ministère concerné a même été rebaptisé « ministère de l’Instruction et du mérite ». En réalité, de nombreux jeunes des milieux populaires doivent renoncer à suivre des études faute de moyens, beaucoup devant déménager pour aller à l’université, en particulier pour celles et ceux originaires du sud du pays.

Devant la protestation, le gouvernement a décidé de débloquer en urgence 660 millions d’euros pour trouver de nouvelles chambres pour les étudiants et étudiantes. Une goutte d’eau par rapport aux besoins, qui d’ailleurs profitera à un organisme de logement privé dont les prix ne sont pas plafonnés. D’autant que dans certaines villes comme Venise, les bailleurs refoulent les étudiants pendant l’été pour laisser la place aux touristes.

La classe politique a fait semblant de s’émouvoir de la misère étudiante, chacun rejetant sur l’autre la responsabilité de cette situation. Il est vrai que le montant des bourses a été baissé par les gouvernements précédents, dont ceux de coalition avec la gauche. Cela explique qu’Elly Schlein, la cheffe du Parti démocrate, a été reçue par des sifflets quand elle est allée rendre visite aux étudiants devant la Sapienza, la grande université de Rome.

Même l’Église s’en est mêlée. Le vice-président de l’épiscopat italien s’est déclaré solidaire de la contestation, tout en s’alarmant du risque de « créer les conditions d’une révolte sociale », ajoutant : « Nous ne devons pas oublier que beaucoup, parmi les pères de ces jeunes qui protestent pour de sacro-saintes raisons ont vécu ou même ont été les protagonistes du 68 italien. »

Nous serions tentés de dire : « Que Dieu l’entende ! »

Thierry Flamand