Depuis sa fondation, l’Union européenne se construit selon un paradoxe pleinement assumé : atténuer l’importance des frontières internes aux pays membres, mais renforcer toujours plus les frontières externes à cet espace. D’où cette expression d’Europe « forteresse » : douze États européens ont déjà fait construire 2 000 kilomètres de murs et de barbelés sur les frontières extérieures de l’UE, et parfois même entre pays de l’UE. Pour se protéger de quel péril ? Non seulement les migrations internationales ne sont pas un danger pour l’Europe, mais elles lui sont nécessaires. De nombreuses projections font état de son déclin démographique : depuis 2012, le solde naturel de l’UE est négatif – c’est-à-dire que le nombre de décès excède le nombre de naissances. C’est par le choix très intéressé de l’ancienne chancelière Angela Merkel d’ouvrir, dans une certaine mesure, les frontières pour accueillir des réfugiés en 2015, que l’Allemagne a enrayé ce déclin démographique… Car le capitalisme sait promouvoir une vision utilitariste des migrants, considérés comme une force de travail nécessaire à son économie. Mais il sait aussi, à travers une propagande politique très étudiée, promouvoir le racisme et la xénophobie. Le thème récurrent d’une Europe qui serait assiégée par les migrants, bien loin de la réalité, est là pour tenter de nous diviser. Les lois qui rendent toujours plus difficile l’immigration légale ont aussi pour effet de rendre les travailleurs étrangers captifs de leurs employeurs et particulièrement vulnérables.
Avec son « Pacte migratoire », le Parlement européen vient encore de durcir sa politique migratoire : les pays d’arrivée seront chargés d’entrer les empreintes digitales, la photo du visage et les documents d’identité des demandeurs d’asile et des migrants dans une base de données centralisée, y compris pour les enfants dès l’âge de six ans ! Dans le cadre d’une « procédure à la frontière », les demandeurs d’asile seront détenus dans ces « centres fermés » durant l’examen de leur demande, y compris les familles avec enfants, pour une durée pouvant atteindre six mois.
L’Union européenne traite les exilés non comme des personnes qui ont besoin d’aide, mais comme des délinquants. Ce « Pacte sur la migration et l’asile » doit être aboli, il faut se battre pour l’ouverture des frontières et le droit à la libre circulation et installation de toutes et tous, ainsi que pour les mêmes droits pour tous les travailleurs !
Selma Labib
Cet article est paru dans le dossier du numéro 13 de Révolutionnaires.
DOSSIER : Sans patrie ni frontières, une seule classe ouvrière, non à l’Europe forteresse !
Sommaire du dossier
- À bas le « Pacte » de l’Union européenne contre les migrants
- Migrer pour survivre
- Frontex, arme de guerre contre les exilés
- Des frontières pour les pauvres, pas pour les riches !
- Les travailleurs saisonniers : une circulation soumise aux besoins des capitalistes
- Travailleurs français immigrés, mêmes patrons même combat ! Régularisation de tous les sans-papiers !
- L’extrême droite prospère sur la pauvreté à Mayotte
- Pour une Europe sans frontières