Nos vies valent plus que leurs profits

À sa santé !

Pauvre Sarkozy, sorti blême du tribunal ! Sa copine Carla Bruni en a arraché, de rage, la bonnette du micro du journaliste de Mediapart, ces pelés, ces galeux, qui avaient eu le culot de révéler le pot aux roses. Il en est quand même sorti, et pas encadré par deux flics pour l’amener direct à la Santé comme c’est le cas le plus courant. Mais avec cinq ans ferme et mise sous écrou (différé de quelques jours ou semaines), exécutables même s’il fait appel, le voilà prochainement domicilié dans une petite chambre à barreaux d’un établissement public du 14e arrondissement au lieu de la villa Montmorency dans le 16e. Même si ce n’est peut-être pas pour très longtemps, car il pourrait ensuite bénéficier des faveurs d’un nouveau bracelet électronique, pour un ancien président, ça la fiche mal.

Pour notre nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu, qui était encore allé demander conseil à Sarkozy ces derniers jours, après sa nomination à Matigon, c’est un gain de temps : pour sa prochaine visite, la Santé sera plus proche de Matignon que le quartier d’Auteuil.

« Association de malfaiteurs » pour un ancien président de la République, c’est un peu dur à porter bien-sûr. Même si leur métier est de fréquenter les plus grands malfaiteurs de la planète, les Trump, les Poutine, voire d’être eux-mêmes chefs de guerre en Afrique ou ailleurs. Mais ça, c’est leur fonction officielle, pas leurs combines personnelles pour avoir les sous de battre leur concurrent à une élection présidentielle. Sur ce terrain, le tribunal n’aurait pas trouvé la preuve des transferts de fonds, et donc zappé le financement illégal de campagne pour ne retenir que les mauvaises fréquentations. Pourtant toutes les précautions avaient été prises : le principal témoin et membre de cette association, Mouammar Kadhafi, qui avait planté quelques jours sa tente en décembre 2007 dans les jardins de l’Élysée à l’invitation de Sarkozy, avait été réduit au silence quatre ans plus tard, à la chute de son régime, exécuté d’une balle dans la peau lors de son arrestation. Mais les juges ont trouvé suffisamment de traces : on peut flouer le monde entier (c’est dans les tâches d’un chef d’État), on ne triche pas trop éhontément dans la concurrence avec ses semblables pour le poste suprême, sans que, des coulisses de l’État, les informations filtrent dont des juges, un peu gonflés, puissent se saisir.

Olivier Belin