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Banlieues chéries – L’expo qui recadre les clichés

Banlieues chéries
Musée de l’Histoire de l’immigration, palais de la Porte-Dorée, du 11 avril au 17 août 2025
Plein tarif : 12 € ; tarif réduit : 9 € ; entrée gratuite pour les moins de 26 ans et pour tous le premier dimanche de chaque mois

 

 

Une histoire déambulée de la banlieue parisienne : c’est le programme de l’exposition du musée de l’Histoire de l’immigration. Dans les couloirs du palais de la Porte-Dorée, le parcours montre et raconte les transformations de l’urbanisme autour de la capitale du XIXe siècle à aujourd’hui.

Une vue en coupe de la vie ouvrière

De la « zone » qui entourait les « fortifs » avec ses premiers bidonvilles et où vivaient les « zonards », jusqu’aux grands ensembles de l’après-guerre, de la peinture « réaliste socialiste » des banlieues rouges, jusqu’aux graffitis et au hip-hop, l’exposition est un hommage réussi à celles et ceux qui ont vécu dans les banlieues ouvrières. Dans cette mesure, elle réussit son but de « dépasser les clichés » et donne à voir la banlieue avec tendresse et un soin du détail certain. Le travail de dessinatrices, photographes, vidéastes ou plasticiens qui ont vécu ou travaillé en banlieue a été sollicité pour donner à voir l’intérieur des foyers, les paysages urbains, les hommes et les femmes dans leur quotidien.

On ne s’étonnera pas, dans ce musée national appartenant à l’État, que la police soit la grande absente de la description de ce quotidien. Notamment, on pourra chercher longtemps dans les textes de l’exposition qui donc a pu tuer Zyed, Bouna, Adama ou Nahel : il faudra décoder l’œuvre murale de l’artiste Vince qui leur rend hommage pour repérer flashballs, photos de banderoles et stickers militants. Pas étonnant non plus que la misère et le « malaise social » (pour parler comme l’exposition), soit montrés comme une sorte de malheur tragique qui s’est abattu sur les banlieusards. Il faudra remplir là quelques pointillés politiques.

Mais l’expo, parce qu’elle ne montre seulement le « malaise social », justement, mais fait une large place à toute la richesse de la vie et de la culture ouvrière à travers son angle géographique, vaut largement d’être vue. D’ailleurs, visiteurs et visiteuses n’ont pas calqué cette dépolitisation. Sur le mur participatif de fin, deux messages reviennent en boucle, deux revendications : « free Palestine » et fin aux oppressions.

Gaspard Janine