Nos vies valent plus que leurs profits

Conclave, comédie et compromission

Édouard Philippe, ancien Premier ministre, évoquait, mine de rien, le 10 mars la réforme du système de retraite au Danemark visant à repousser l’âge de départ à 70 ans, ajoutant : « Désormais, la question qui va être posée aux partenaires, c’est : comment on finance cet effort ? Je suis curieux de voir la conclusion, mais je pense qu’il va falloir à nouveau se poser la question du système par capitalisation. » Le président du Comité d’orientation des retraites (COR) n’est pas en reste, le 5 mars il a écrit : « L’entrée progressive dans une économie de guerre rendra secondaires sinon dérisoires les débats actuels sur l’âge d’ouverture des droits à la retraite à 64 ans. […] La question deviendra plutôt […] comment augmenter rapidement cet âge au-delà des 64 ans… » De son côté, le président de la banque d’investissement Bpifrance saute à pieds joints dans l’invective offensante : haro sur les retraités, « ces faux vieux [qui] sont en fait de vrais jeunes ». Et tous les politiciens de droite et représentants patronaux que compte le pays de s’engouffrer dans la brèche : il faudrait travailler plus longtemps et « capitaliser » tout ou partie de sa future pension. On est bien loin d’un hypothétique aménagement de la loi Borne sur la retraite à 64 ans. La guerre aux retraites des travailleurs est bel et bien déclarée.

Cela n’empêche pas les syndicats, sauf FO qui a claqué le porte à la première réunion, de s’accrocher à ces réunions d’enfumage dites de « conclave », d’où rien de bon ne peut sortir pour les travailleurs, si jamais il en sort quelque chose. Sophie Binet, pour la CGT, a même eu le culot, et la fausse naïveté, d’envoyer au Premier ministre un courrier pour lui demander des « éclaircissements » ! Comme si elle ne savait pas, dès le début, que ce « conclave » n’a été qu’un attrape-nigaud agité par Bayrou pour éviter le vote de la censure par les députés du PS. Lequel Bayrou a encore mis les points sur les i dimanche 16 mars sur France Inter en réaffirmant avec fermeté qu’il était hors de question de revenir sur l’âge légal de départ à 64 ans. Ce qui a fait hurler le représentant de la CGT à la « trahison de la parole donnée » ! On a rarement vu cinéma plus grotesque.

18 mars 2025, Michel Grandry