Les dernières élections régionales en Allemagne, qui ont eu lieu en octobre, ont vu un recul des partis de la coalition qui gouverne au niveau fédéral1, mais aussi une extrême droite qui s’installe toujours plus durablement.
Les élections régionales1 en Hesse et en Bavière ont confirmé la tendance depuis le début de la coalition « feu tricolore » sous le chancelier social-démocrate Scholz, allié aux écolos et aux libéraux. Dans les deux régions, les seuls partis qui ont reculé sont les trois partis de la coalition, les libéraux échouant même à passer la barrière des 5 % en Bavière pour accéder au parlement. Visiblement, l’absence de toute réponse politique du gouvernement face à l’inflation, qui frappe plus fortement en Allemagne qu’en France, se reflète dans ces chiffres. Pour les libéraux, c’est la huitième élection régionale en recul depuis le début de la coalition en septembre 2021, et les sociaux-démocrates et écolos ne dérogent plus à la règle.
L’extrême droite s’installe
Mais la défiance, voire la déception face au gouvernement se reflète aussi dans les progrès d’une extrême droite qui s’installe de plus en plus confortablement. Après quelques revers, l’AfD – Alternative pour l’Allemagne – s’établit durablement dans le paysage électoral : 15 % en Bavière et 18 % en Hesse, avec la plus grande progression de tous les partis. Et il n’y a pas que l’AfD : les « électeurs libres », d’un parti plutôt conservateur et localiste qui n’existe que dans ces deux régions, ont atteint un score record de 16 % en Bavière. Et cela, alors que leur dirigeant était visé par un scandale peu commun : déjà bien connu pour des positions anti migrants, il a de plus sur le dos le fait révélé d’avoir distribué un brûlot antisémite sous le titre peu ambigu de « pamphlet Auschwitz » au lycée. De la provocation, dit-il, avant que d’anciens camarades de classe ne se rappellent qu’il ne venait jamais au lycée sans… son exemplaire de Mein Kampf dans son cartable ! Des révélations qui n’ont pas empêché un résultat record, et une très probable participation gouvernementale avec les chrétiens démocrates, dont le dirigeant au niveau fédéral s’est lui-même distingué par des remarques sur les migrants, qui auraient des rendez-vous médicaux sur simple demande, pendant que de bons citoyens allemands crèveraient dans les files d’attente…
Après plus d’un an marqué par des grèves sur les salaires, la gauche gouvernementale montre avec brio son incapacité à améliorer les choses. L’opposition ne semble guère plus convaincante : la gauche radicale, Die Linke, en pleine désintégration après le départ d’une fraction flirtant avec le nationalisme et militant pour une reprise des relations avec la Russie, a perdu sa dernière place dans un parlement régional ouest-allemand, en Hesse. Ce sera aux travailleurs d’Allemagne eux-mêmes d’offrir des perspectives à l’opposé du discours toujours plus nauséabond qu’installent l’extrême droite et la droite conservatrice, pour que la déception face à la politique gouvernementale ne pave pas le chemin d’un nouveau virage à droite dans le paysage politique allemand.
Dima Rüger
1 Le gouvernement dirigé par l’actuel chancelier social-démocrate Olaf Scholz, vainqueur à la majorité relative des élections fédérales de septembre 2021, s’appuie sur une coalition tripartite dite « feu tricolore » entre les sociaux-démocrates, les écologistes et les libéraux.
2 En Allemagne, les régions (Bundesländer), ont leur propre gouvernement, qui a des prérogatives importantes, par exemple dans l’enseignement.