Nos vies valent plus que leurs profits

Fermeture de la maternité des Lilas par l’ARS : Avide Rassemblement de Sangsues ?

Depuis 1964, la maternité des Lilas est un lieu emblématique des progrès de la médecine et de prise en charge du corps : accouchements moins douloureux, IVG illégaux, et plus récemment soins des personnes transgenres, notamment pour des hommes, ayant gardé leur utérus et pouvant tomber en-ceint. Depuis une trentaine d’années, la maternité a été sauvée in extremis à plusieurs reprises par une lutte menée par les salariés et un fort soutien populaire. La maternité est en attente de liquidation judiciaire et c’est l’incertitude pour les équipes, les personnes bénéficiant des soins et celles qui sont sur le point d’accoucher. Porteuse de projets progressistes et féministes, elle est victime des coupes budgétaires tous azimuts et de logiques de rentabilité.

Faire de l’argent sur la santé c’est multiplier les actes médicaux, comme les césariennes, plus rapides que des accouchements physiologiques et facturées plus cher. C’est réaliser des suivis moins importants des patientes qui ne rapportent pas suffisamment d’argent. Pour les Lilas, le suivi est personnalisé, fait par une petite équipe, en réduisant les interventions médicales non nécessaires, c’est sept rendez-vous de préparation à l’accouchement, avoir la possibilité de rester jusqu’à sept jours après l’accouchement et des IVG jusqu’à quatorze semaines de grossesse.

Les logiques du chiffre, c’est l’augmentation de la cadence, donc l’augmentation des risques de violences obstétriques et gynécologiques. Le ton est donné, l’accent est mis sur la prise en charge express, trois jours, pas plus, à l’hôpital pour une naissance, aucun moyen pour les formations des équipes, alors même qu’un accompagnement conséquent lutte contre la dépression post-partum, première cause de mortalité maternelle lors de la première année.

Quelles solutions sont proposées à l’équipe, dont des salariés depuis plus de 30 ans ? Pas de PSE, pas d’indemnités prévues, pas de date de licenciement, mais des directeurs successifs avec de fausses solutions pour justifier la fermeture. Eux, qui bien sûr partent avec entre 60 et 140 000 euros d’indemnités pour moins de quatre ans en poste. À contrario, on propose au personnel de se greffer à des services qui ne peuvent pas les accueillir à l’hôpital de Montreuil. Ou de rejoindre des structures dans lesquelles les conditions de travail sont détériorées : diminution du nombre de sage-femmes de garde, pas de salle de pause prévue, tâches d’hôtellerie et de bionettoyage pour les auxiliaires de puériculture qui font les bouche-trous, baisses de salaire et non-prise en compte de l’ancienneté.

Pour les patientes et les patients du 93, département le plus pauvre de l’Hexagone, qui connaît aussi le plus fort taux de natalité, c’est un coup de massue, car il s’agit de la quatrième maternité qui ferme ses portes en dix ans. Pour les Lilas, il s’agit maintenant de tenter de replacer ici et là ses patientes et patients bien que certaines accouchent dans moins de deux mois. Dans cette structure, ce sont 700 IVG et 600 naissances par an et tant que le choix restera de couper dans les budgets et de fermer des maternités, le changement de département sera généralisé.

Plus largement, ce sont 32 structures d’IVG qui ont fermé en France et 7 centres de santé en Île-de-France ces dernières années. Pour la grande cause du quinquennat… on repassera. Ces fermetures n’ont rien d’anodines et s’inscrivent dans une logique de politiques menées par et pour le profit, qui précarise davantage les habitantes et les habitants de déserts médicaux.

Maddie Forestier