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Gaza, Cisjordanie : bombardements entre deux trêves et colonisation

Ce 17 février, alors que venait de s’achever la première phase du cessez-le-feu à Gaza, avec les échanges prévus d’otages, et que doivent se négocier les modalités de la suite de la trêve, l’aviation israélienne a bombardé un convoi de camions dans la ville de Khan Younes (près de Rafah au sud de la bande de Gaza), tuant trois policiers palestiniens chargés de l’accompagner. Pression sanglante dans l’entre-deux phases qui en dit peut-être long sur ce que compte faire Israël à l’issue du cessez-le-feu lui-même, quand l’ensemble des otages auront été libérés et que Netanyahou aura les mains encore plus libres.

Stratégie de l’enfer

D’autant que celui-ci se sent renforcé par la surenchère de Donald Trump qui préconise de débarrasser la bande de Gaza de tous les Palestiniens pour en faire une nouvelle Côte d’Azur ou un nouveau Miami. Netanyahou a tenu à affirmer devant le nouveau secrétaire d’État américain Marco Rubio, en tournée dans la région pour vendre le plan Trump, qu’il s’engageait à respecter ce plan de vider Gaza de ses habitants, et qu’il a avec les États-Unis « une stratégie commune, […] y compris la question de quand s’ouvriront les portes de l’enfer si les otages ne sont pas libérés ». Question enfer, les États-Unis ont livré à Israël, mi-février, un nouveau stock de bombes lourdes, dont la spécificité est non seulement de traverser d’épaisses couches de béton, mais surtout d’avoir un très large rayon d’explosion pour faire un maximum de victimes.

Les plans des dictatures arabes, pas pour aider les Palestiniens, mais pour les contrôler et les gouverner

Du côté des gouvernements d’Égypte et de Jordanie, pourtant alliés des États-Unis, le projet d’expulser tous les Gazaouis ne passe pas : pas question pour les dictatures qui y règnent de devoir accueillir deux millions de pauvres de plus, et dont leurs propres populations pauvres se sentent solidaires. Alors, pendant que l’émissaire de Donald Trump faisait au Moyen-Orient la tournée de popotes pour vendre son projet, ce sont les gouvernements d’Égypte, de Jordanie, d’Arabie saoudite et du Qatar qui se sont concertés pour proposer leur plan : un plan de reconstruction de Gaza disent-ils… pour le bonheur des promoteurs saoudiens ou qataris si cela se fait. Mais, surtout dans l’immédiat, leur plan n’est pas de venir en aide au peuple palestinien – ils ne l’ont jamais fait –, mais de le gouverner, puisqu’il s’agit d’éliminer le Hamas, alors que l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas – à qui le Hamas se dit prêt à abandonner la gestion de Gaza, selon des informations publiées le 17 février par Sky News – leur en semble incapable, tant elle s’est déconsidérée par sa collaboration avec l’État d’Israël.

En Cisjordanie : ratissages, 45 000 Palestiniens expulsés, des dizaines de morts

Entre-temps, l’armée israélienne poursuit son offensive en Cisjordanie. Début février, le camp de réfugiés palestiniens d’Al Farraa, dans le nord de la Cisjordanie, a été ratissé pendant plus de dix jours par l’armée israélienne : perquisitions, destruction d’infrastructures – électricité, conduite d’eau. Depuis le début de l’offensive de l’armée israélienne en Cisjordanie, qui a commencé le 21 janvier à Jénine, 45 000 Palestiniens de Cisjordanie ont été expulsés de chez eux. Les opérations ont fait des dizaines de morts.

Le peuple palestinien a besoin de tout notre soutien

La trêve à Gaza n’est qu’une trêve pendant laquelle l’armée israélienne s’adonne à un autre des objectifs d’Israël, que Netanyahou se vante de vouloir mener jusqu’au bout : le grand Israël de la mer au Jourdain. Le peuple palestinien a besoin de tout notre soutien. En espérant que les manifestations dans le monde renforcent aussi ceux qui, dans les pays voisins, se sentent solidaires du peuple palestinien, mais subissent les dictatures d’un Maréchal Sissi, d’un roi de Jordanie et de princes saoudiens. Et pourquoi pas, enfin, une opposition en Israël même, si minoritaire aujourd’hui qu’elle n’arrive pas à se faire entendre, mais qui devrait bien finir par émerger tant la politique des gouvernants du pays est révoltante.

Olivier Belin