Le handicap concerne entre 2,6 et 12 millions de personnes en France, selon les critères retenus par les différents organismes statistiques et les associations. Un écart significatif qui laisse deviner les difficultés dans l’accès au droit et à la reconnaissance. Au-delà de la dimension plus ou moins invalidante, c’est beaucoup l’inadaptation de l’environnement ou des tâches demandées qui fait le handicap1.
Que ce soit dans la vie quotidienne, à l’école ou encore au travail, les difficultés restent nombreuses, quand elles ne s’accentuent pas. Sur l’accessibilité par exemple, trois lois sont restées inappliquées depuis 50 ans. En 1975, la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées adoptait une obligation d’accessibilité pour tous les établissements recevant du public (ERP)2, mais sans y consacrer de budget. En 2005, la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées fixait un délai de dix ans aux ERP pour être aménagés. En 2013 et 2014, ce délai a été rallongé et de multiples dérogations ont été accordées. Si bien qu’en 2023, seule la moitié des 1,8 million d’ERP était « dans une démarche vers l’accessibilité ». Dans les transports en commun aussi, le retard reste criant. À Paris, plus de 90 % des stations de métro restent inaccessibles aux personnes « à mobilité réduite »3, moins de 10 stations sur 29 à Marseille.
En 2017, Macron candidat déclarait lors du débat d’entre-deux-tours « ne plus vouloir de personnes vivant en situation de handicap qui soient sans solution » et en faisait une « priorité » de son quinquennat, avec des propositions comme sortir l’allocation aux adultes handicapés du seuil de pauvreté, l’embauche d’auxiliaires de vie et des avancées dans l’accessibilité… Mais les seules promesses qui l’engagent sont celles faites aux grands capitalistes. Par exemple, la loi sur l’évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Élan) supprime l’obligation d’accessibilité aux personnes handicapées pour tout logement neuf au nom de la « simplification des normes », ramenant l’obligation à 20 % des constructions.
La « belle vitrine » des Jeux paralympiques en 2024, ou d’ailleurs seules 1 % des places étaient réservées et accessibles aux personnes en situation de handicap, permet au ministère des Sports et des jeux d’affirmer : « L’ambition d’accessibilité universelle s’est, elle aussi, concrétisée. ». Tony Estanguet, président du comité d’organisation des Jeux olympiques allant jusqu’à parler de « révolution paralympique ». Mais les épreuves restent nombreuses pour les personnes handicapées.
Norbert Moravcik
Dossier du numéro 26 de Révolutionnaires
- Handicap : les lois sur l’accessibilité inappliquées depuis 50 ans
- L’accès aux droits, un parcours du combattant !
- Inclusion scolaire : tout reste à faire
- Discriminations au travail
- Brèves
1 Depuis 2005, la loi définit le handicap comme : « Toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant.
2 Administrations, commerces, établissements de santé, écoles, cinémas, etc.
3 9 % des stations sont accessibles selon la RATP, moins de 4 % pour les associations, et encore quand les ascenseurs fonctionnent.