Ici, les femmes ne rêvent pas : récit d’une évasion, de Rana Ahmad
Globe, 2018, poche 2021, 8,40 €
Publié en français en 2018, Ici, les femmes ne rêvent pas de Rana Ahmad est un cri de rage contre le système patriarcal saoudien. L’autrice, qui a grandi en Arabie saoudite, expose avec une lucidité tranchante les mécanismes de contrôle mis en place par cette monarchie religieuse : la tutelle masculine, cette chaîne omniprésente, qui impose de demander l’autorisation à un membre masculin de sa famille pour prendre toute décision, mais aussi le voile intégral imposé comme prison de tissu.
De son enfance à l’échec de son mariage en Syrie jusqu’à sa fuite en Allemagne, où elle vit toujours, Rana Ahmad nous fait vivre sa prise de conscience progressive et sa rébellion intérieure grandissante. Chaque page vibre de sa révolte et de sa soif de liberté. Son apprentissage de l’anglais devient un acte subversif, sa lecture des œuvres de Darwin et de Nietzsche se transforme en fenêtre vers l’émancipation, jusqu’à son abandon de l’islam et son athéisme, puni de mort en Arabie saoudite.
Menacée et méprisée par ses proches, Rana Ahmad a élaboré un plan audacieux pour s’échapper du pays. Son périple l’a menée en Turquie, avant de lui faire traverser la Méditerranée vers la Grèce et entamer un voyage éprouvant à travers les camps de réfugiés en Europe. Arrivée en Allemagne, elle a dû faire face aux défis de l’exil. Bien que libérée des contraintes immédiates du patriarcat saoudien, elle s’est retrouvée confrontée à la précarité d’une nouvelle vie en tant que réfugiée. En 2017, elle a cofondé l’association Atheist Refugee Relief, visant à soutenir les réfugiés qui, comme elle, ont fui la persécution religieuse.
Poignant et révoltant, Ici, les femmes ne rêvent pas est une lecture vivement conseillée à celles et ceux qui souhaitent comprendre les réalités oppressives et les luttes quotidiennes des femmes à travers le monde.
Martin Eraud