Provocation ? Meloni a choisi de tenir exceptionnellement un Conseil des ministres le 1er mai pour annoncer ses attaques contre les plus pauvres. Une « réforme des mesures de lutte contre la pauvreté et d’insertion active » a été adoptée, supprimant le Revenu de citoyenneté, introduit par la loi en 2019, qui aurait, selon la cheffe du gouvernement, « un effet dissuasif sur le travail ». Une dénonciation d’un prétendu assistanat dont profiteraient les chômeurs, qu’on connaît aussi de ce côté des Alpes, de Macron à Le Pen, voire à gauche.
La réalité est bien différente des discours anti-pauvres : ce revenu est perçu par à peine la moitié des six millions d’Italiens considérés en état de pauvreté absolue. Beaucoup renonçant à en faire la demande, tant la complexité des démarches et les tracasseries administratives constituent un barrage pour les plus précaires. Il est de 750 euros maximum, mais le montant perçu est en moyenne de 572 euros.
À peine arrivé au pouvoir, le gouvernement d’extrême droite a remplacé cette allocation minimale par « un chèque d’insertion » pour les foyers comprenant un enfant mineur, une personne handicapée ou âgée de plus de 60 ans. Pour les personnes considérées « employables », entre 18 et 59 ans, ce revenu sera remplacé par un chèque mensuel de seulement 350 euros, présenté comme une « aide pour la formation et le travail » à condition de suivre un cours de formation professionnelle ou effectuer un travail socialement utile (mais non payé) au sein de leur commune ou d’une collectivité. Ce chèque sera versé pour une durée maximum de 12 mois, non renouvelable.
En conséquence, 615 000 personnes perdront leur allocation, car considérées aptes à l’emploi… quand bien même ces emplois n’existent pas ! Le gouvernement devrait ainsi économiser un milliard d’euros par an, sur le dos des plus démunis. Manière de faire pression sur les chômeurs pour les forcer à accepter n’importe quel emploi, et donc tirer vers le bas l’ensemble des salaires.
D’ailleurs, Meloni vient d’assouplir le recours aux contrats précaires avec un nouveau « décret Travail » qui supprime les règles en vigueur (déjà peu respectées) pour renouveler ou prolonger un contrat à durée déterminée au-delà de 12 mois. Il n’est même plus nécessaire d’invoquer des « exigences techniques, organisationnelles ou productives » pour renouveler ces contrats courts. Et ce décret « assouplit » les conditions d’emploi dans les secteurs du travail occasionnel (congrès, fêtes, établissements balnéaires…).
Car, selon le gouvernement, tout devrait se régler d’un « commun accord » entre salariés et employeurs, ce qui signifie livrer les travailleurs au bon vouloir des patrons. Diviser les salariés entre immigrés ou natifs, chômeurs ou actifs, c’est la vieille rengaine de l’extrême droite pour mieux exploiter tout le monde, en Italie comme ici.
Thierry Flamand