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Kanaky : avec Valls à la manœuvre, le temps des colonies, ce n’est pas fini !

Valls, ministre des Outre-mer, n’a visiblement pas changé d’avis depuis 2018, quand il affirmait son « attachement au lien qui unit la Nouvelle-Calédonie à la France ». Pour preuve, s’il en fallait, le projet d’accord qu’il propose au nom de l’État français aux partis indépendantistes et loyalistes après sa visite du mois de février sur l’archipel.

Selon le texte, soumis à des séances de négociations en visioconférence durant plusieurs semaines, le territoire calédonien doit se trouver engagé dans une nouvelle « étape de son émancipation, fondée sur une montée en responsabilité progressive, le partage encadré de certaines compétences régaliennes et la consolidation d’une citoyenneté calédonienne ». Un accord qui pourrait être transposé dans une loi fondamentale, inscrite dans la Constitution française. L’exercice du droit à l’autodétermination serait conservé, mais il s’agirait désormais de proposer aux habitants de l’archipel un « référendum de projet » et non plus de dire oui ou non à l’indépendance, pour « rompre avec la logique binaire des précédentes consultations » et « engager l’ensemble des forces politiques calédoniennes dans une dynamique de responsabilité ». Pour être soumis au vote, un tel projet devrait d’abord être adopté par le Congrès calédonien à la majorité des trois cinquièmes… alors que les indépendantistes n’y détiennent aujourd’hui qu’un peu moins de la moitié des sièges. Sur le contenu dudit « projet », les circonvolutions sont aussi élevées que sont nombreux les gendarmes sur l’archipel, puisqu’il « pourrait porter sur un nouveau partage de souveraineté ou sur l’accession à la pleine souveraineté incluant le transfert des compétences régaliennes, lesquelles pourraient faire l’objet d’une délégation immédiate à la France ». Aucune date n’est envisagée pour un nouveau référendum, mais il pourrait être organisé « à l’issue d’une période de stabilisation et de construction nécessaire à l’apaisement sociétal, à la reconstruction économique et financière et à la maturation démocratique du pays »… En attendant, les compétences régaliennes (relations internationales, défense, police, justice, monnaie) continueraient d’être exercées par la France qui promet juste de mieux associer la Nouvelle-Calédonie, par le biais de « mécanismes spécifiques de concertation, de co-construction ou de codécision », ainsi que par « la formation et l’intégration de cadres calédoniens, civils et militaires, issue des concours de la fonction publique ». Blablabla… Valls, tais-toi, la Kanaky n’est pas à toi !

Quant au projet lancé par Macron sur le dégel du corps électoral, qui avait déclenché l’immense révolte de 2024 au sein de la population kanak, s’il n’est pas directement remis sur la table, il est évoqué que dix à quinze ans de résidence soient nécessaires pour pouvoir s’exprimer aux élections provinciales et lors des éventuels référendums d’autodétermination. La citoyenneté deviendrait de droit pour les natifs, les enfants et conjoints de citoyen. À terme, c’est l’assurance de la minorisation définitive du peuple kanak sur sa propre terre.

Pendant ce temps-là, le 8 avril, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de Christian Tein, le dirigeant de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT) qui, durant des mois, a mené la lutte contre l’État français et qui est en détention « provisoire » depuis juin 2024 à 16 000 kilomètres de chez lui, à la prison de Mulhouse. Liberté pour Christian Tein et tous les déportés politiques kanak !

14 avril 2025, Marie Darouen