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La peste brune européenne : de leurs urnes à nos rues ?

En 2002, Jean-Marie Le Pen, content de lui, disait : « Tout le monde parle comme moi, je me suis normalisé. » Les ministres macronistes qui, face à l’élan de solidarité pour Gaza, manifestent aux côtés de sa fille et de Zemmour pour soutenir Netanyahou, semblent tout faire pour concrétiser son rêve. Une alliance avec l’extrême droite face aux contestations politiques qui pullulent en Europe.

L’extrême droite progresse… mais la contestation sociale aussi

La Hongrie d’Orbán n’est pas un pays fasciste ou une dictature militaire : formellement, le régime s’est maintenu et des élections ont lieu. Toutefois, les libertés, ciblées tant par l’État que par des gros bras, se réduisent : libertés politiques des opposants de gauche ou même des magistrats et journalistes, libertés des minorités de tout genre : Roms, immigrés, LBGT. Leur « illibéralisme » a des conséquences sur la classe ouvrière : un droit du travail miné, des protections syndicales drastiquement réduites. Mais depuis plusieurs années, la Hongrie connaît aussi des contestations sociales que la presse présente comme les plus importantes depuis 1989.

En Pologne, le parti Droit et justice (PiS), quand il était au pouvoir, s’affichait ouvertement comme allié d’Orbán et usait pour partie de la même rhétorique chrétienne. Il s’est permis de réduire considérablement les conditions légales d’avortement… et a fait descendre dans la rue une vague féministe qui a duré des années ! Se rendant en grand nombre aux urnes, de jeunes Polonais l’ont récemment écarté du pouvoir. Ces politiciens sont certes utiles pour certaines franges du patronat européen, mais n’ont rien à proposer aux travailleurs et à la jeunesse ! En Slovaquie, la coalition gouvernementale, dominée par l’extrême droite, qui vient de se mettre en place peut bien placer un climatosceptique au ministère de l’Environnement, cela ne fera pas augmenter les salaires.

Les digues sautent ? Autoritarisme et cogestion

Dans les pays impérialistes, la montée de l’extrême droite a mené les partis traditionnels à des concessions politiques et à un partage du pouvoir via des coalitions. C’est ainsi que, aux Pays-Bas, l’extrême droite a réalisé une poussée électorale, après une campagne marquée par des discours xénophobes venus du centre, et pourrait accéder au gouvernement. Son succès a été directement favorisé par tous ceux qui ont repris à leur compte les thèmes qu’il a mis en avant. Au-delà des discours, on trouve des politiques anti-immigrés que droite classique et gauche ne craignent pas de mettre en œuvre, au Royaume-Uni, au Danemark ou en Allemagne. Tandis que le Premier ministre britannique présente un plan anti-immigration, outre-Rhin, ce sont les sociaux-démocrates au pouvoir qui durcissent les conditions d’asile, renforcent les prérogatives des flics, étendent les durées des rétentions.

En Suède, les « démocrates suédois », organisation lancée par des néo-nazis avant de se « contenter » d’incarner un parti anti-immigrés, ont réussi à s’imposer par les urnes dans une coalition de droite. En Italie, le « pas d’ennemis à droite » a fait passer Meloni d’un poste de sous-ministre de Berlusconi à celui de dirigeante de l’Italie qui prétend « changer de régime ». Un changement dans la continuité de l’austérité. En compagnie de ses amis de droite, Meloni promettait lors de sa campagne d’abroger une réforme des retraites introduite en 2011 et repoussant souvent de cinq ans l’âge de la retraite. Une fois au pouvoir… elle prévoit d’alourdir les pénalités financières contre celles et ceux touchant leurs droits à la retraite avant 67 ans.

En France, le Rassemblement national se normalise à grande vitesse. Au Parlement, les élus, du centre à l’extrême droite, jouent aux enchères les pires mesures d’une nouvelle loi immigration, tandis que des députés de la France insoumise font mine de vouloir « revenir à un texte discutable ». Comme s’il pouvait y avoir des discussions avec ceux qui courent après l’extrême droite ! Il faut reprendre la rue, c’est là que nous ferons reculer les gouvernements, peu importent leurs étiquettes.

Chris Miclos

(Article paru dans le numéro 8 de Révolutionnaires)