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Législatives au Royaume-Uni : les travaillistes ont gagné, pas les classes populaires

Comme le prédisaient les sondages depuis des mois, les travaillistes ont obtenu le 4 juillet la majorité absolue au Parlement (411 sièges). C’est le nombre de sièges le plus important pour le Labour Party depuis le début du XXe siècle. Et si cette victoire traduit en partie un ras-le-bol de quatorze ans de gouvernements conservateurs, elle est très loin de représenter une adhésion populaire au parti de Keir Starmer. Avec 40 % d’abstention, le Labour recueille un peu moins de 9,7 millions de voix (33,7 %), contre plus de 10 millions il y a cinq ans et plus de 13 millions en 2017, années où il avait pourtant perdu les élections. Dans sa propre circonscription, Starmer a perdu la moitié de ses voix, passant de 36 000 à 18 000. Starmer est arrivé à la tête du Labour en 2020, après la démission de Jeremy Corbyn, le leader de l’aile gauche travailliste, qu’il a à peu près entièrement chassée du parti. C’est d’ailleurs aussi en chassant sur les terres de l’extrême droite que le résultat des dernières élections a été obtenu, Starmer promettant comme les autres de réduire l’immigration. Il a donc dû se confronter sur sa gauche à des candidats indépendants qui lui reprochaient tout à la fois l’abandon de toute politique sociale et son alignement sur Israël dans la guerre de Gaza.

Quant aux conservateurs (121 sièges et 23,7 % des voix), ils ont perdu des plumes au profit d’un autre parti de droite, les libéraux-démocrates (71 sièges, 12,2 %), mais, surtout, de l’extrême droite, le Reform UK Party de Nigel Farage, l’instigateur du Brexit, qui n’a que quatre sièges mais est arrivé en seconde position dans nombre de circonscriptions et dont les candidats ont recueilli au total plus de quatre millions de suffrages.

La City, le cœur financier du capitalisme britannique, a plutôt bien accueilli la victoire de Starmer qui n’a cessé de lui donner des gages de loyauté. La Bourse de Londres a même ouvert en légère hausse au lendemain des élections : avec Starmer au gouvernement, le patronat n’a vraiment rien à craindre.

Philippe Cavéglia et Jean Liévin