
Les grandes oubliées – Pourquoi l’Histoire a effacé les femmes
Titiou Lecoq
L’Iconoclaste, 2023, nouvelle éd. augmentée en poche, 2025, 223 p., 8,50 €
Introduction : « Les femmes ne se sont jamais tues ». Chapitre 1 : La femme préhistorique a-t-elle existé ? Réponse : « Il n’y pas une femme de la Préhistoire, mais des femmes, comme le rappelle l’historienne Claudine Cohen. » Exclues de la chasse pour cause de maternité ? En réalité, elles pratiquaient l’espacement des naissances. Et donc… 10 000 ans plus tard, chapitre 3 : « Au Néolithique, l’invention du culte du chef ». Avec la sédentarité, le nombre d’enfants par femme augmente. Avant, on travaillait trois heures par jour pour sa survie. Désormais, on s’esquinte le dos à cultiver la terre toute la journée. Mais une bonne idée : pour se reposer, faire travailler d’autres gens ! « La sédentarisation et la propriété privée contribuent à renforcer un régime de la domination ». Et donc….
Sautons quelques chapitres et millénaires. Chapitre 5 : « Au Moyen Âge, reines et chevaleresses exercent le pouvoir ». Brunehaut cherche à unifier le royaume et à centraliser le pouvoir, ce qui fait perdre de leur influence aux nobles. « […] la société médiévale était pyramidale. C’était une société de classes. Elle ne divisait pas avant tout l’humanité en hommes et femmes. Elle la divisait en catégorie sociale. » Et donc…
300 ans plus tard, chapitre 9 : « Autrice, oubli d’un mot et d’une profession ». Le combat des femmes prend un tour linguistique. Au Moyen Âge, il existait des féminins qui ont disparu : chevaleresse, jongleresse, autrice, tavernière… Avec accord de proximité. L’Académie française change les règles au XVIIe siècle. Les femmes regimbent. Mme de Sévigné, à qui un homme disait « Je suis malade », répondait « Je la suis également »… Les autrices ont été gommées, les compositrices, les sculptrices, les femmes peintres aussi, comme Artemisia Gentileschi, et tant d’autres…
Chapitre 11 : « Révolutionnaires étouffées ». Adresse des citoyennes françaises à l’Assemblée nationale : « … Rendrez-vous esclaves celles qui ont contribué avec zèle à vous rendre libres ? ». Après l’abolition des privilèges dans la nuit du 4 août, elles demandent l’abolition des privilèges masculins. Puis le pire arrive, avec le Code Napoléon. Les chapitres se succèdent. XXe puis XXIe siècle. Chapitre 16 : « À la conquête des droits depuis l’après-guerre ». Chapitre 17 : « La pensée sexiste toujours vivace ». Et Titiou Lecoq de conclure, dans son style aussi alerte que précis : « Lutter contre l’oublioir » (terme emprunté à Aimé Césaire).
Un essai magnifique, ravageur et nuancé, qui, au fil du récit, donne toutes ses sources historiques. Indispensable.
22 juillet 2025, Huguette Chevireau