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L’extrême droite en embuscade : Le Pen et Bardella se préparent à dicter sa politique au gouvernement

Après le référendum anti-Rassemblement national qu’a représenté le second tour des élections législatives, tout le monde a parlé de la défaite de l’extrême droite. Nous faisons partie de ceux qui se sont réjouis que deux tiers des électeurs aient refusé l’arrivée de Le Pen-Bardella au pouvoir. Mais, pendant l’été, à en croire les élus allant de ceux des Républicains à ceux du Nouveau Front populaire, l’avenir parlementaire et gouvernemental se jouait sans le RN.

C’était oublier un peu vite que le RN n’avait jamais recueilli autant de voix à des Législatives ni eu une représentation parlementaire aussi importante, et que la combine du front républicain avec la droite ne le faisait pas disparaître par miracle. Macron ne l’a pas oublié, lui ! Après avoir cherché où piocher pour gouverner avec lui – dans la droite de la gauche ou la droite de la droite –, il a fini par choisir un politicien accepté par Le Pen : sans aller jusqu’à dire que c’est Le Pen qui a choisi Barnier, on peut tout de même constater qu’il a été choisi d’un commun accord par Macron et Le Pen…

L’extrême droite va pouvoir se payer le luxe de dicter, dans une certaine mesure, sa politique au gouvernement en laissant planer la menace de rallier une motion de censure qui serait déposée par la gauche.

Macron offre au RN la possibilité de faire la démonstration à la bourgeoisie qu’il est un parti « responsable », capable de « sortir le pays de la crise politique » en permettant à un gouvernement de se former et en étant prêt à collaborer avec lui. Le Pen-Bardella ont trois ans pour démontrer aux classes dirigeantes que le RN n’est pas, ou n’est plus, le ramassis de fachos mis en avant aux dernières Législatives, mais un parti de politiciens bien réacs, tout à fait fréquentables. Trois ans pour souffler le texte des mesures les plus rétrogrades que prendrait un gouvernement Barnier ; trois ans pour être en soutien de fait à ce gouvernement plébiscité par le Medef – mais sans y participer, ce qui leur permettra de continuer à faire semblant d’être du côté des classes populaires et d’espérer arriver à la Présidentielle de 2027 sans s’être « sali les mains » au gouvernement. Une position d’équilibriste tout de même risquée, que tous ceux qui veulent lutter contre l’extrême droite pourront mettre à profit… pour faire trébucher le RN dans l’opinion populaire !

Pour les travailleurs, Le Pen-Bardella représentent une menace grave, qui ne sera pas écartée par le jeu parlementaire. La lutte contre l’extrême droite est en réalité la même que celle que les travailleurs devront mener contre les attaques que préparent le pouvoir et le patronat. Si le monde du travail se renforce par des victoires, il sera en bien meilleure position pour faire face à l’extrême droite. Car, dans tous les cas, il faudra lui faire face.

Jean-Jacques Franquier

(Article paru dans le numéro 18 de Révolutionnaires)