Un mouvement de grève très populaire
L’ambiance est à la bonne humeur sur le piquet de grève devant l’usine de Lubrizol de Rouen. Normal, depuis une semaine rien n’est sorti de l’usine. La totalité des travailleurs de la production ont cessé le travail, syndiqués ou non. Les seuls qui y vont sont ceux réquisitionnés par la préfecture pour assurer la sécurité de cette usine classée Seveso. Même pour ne rien produire les patrons n’arrivent pas à se passer des travailleurs !
Le mouvement de grève est unanime à la production, mais il est fort aussi du soutien de tous les autres travailleurs de l’entreprise. À la logistique, on compte aussi des grévistes et de toute façon « pas de production, pas de camions, hein ». Les bureaux, eux, étaient en grève la semaine dernière et continuent de soutenir leurs collègues. À la pause déj, les collègues de tous les services viennent sur le piquet discuter et soutenir les grévistes.
Les travailleurs pris pour des cons
Il faut dire que la boîte avait un peu trop la confiance quand en février elle annonçait un plan de licenciements de 169 salariés (sur 374, une hécatombe !) alors qu’elle sort des profits de plus de 60 millions d’euros. Décidément ça ne passe pas… Surtout que les col-blancs ont tenté des pirouettes ridicules pour se justifier : la boîte devrait sortir 40 millions d’euros pour les dédommagements à venir des victimes de l’incendie d’il y a cinq ans, c’est quoi cette blague ? Ce serait aux travailleurs de faire les frais des catastrophes industrielles créées par la course aux profits des patrons ? Mais la plus grosse farce : l’entreprise a tenté de justifier le licenciement de ses salariés par le fait que les produits seraient de trop bonne qualité, ainsi ils auraient une trop bonne durabilité et les clients n’en rachèteraient pas. Carrément ça va être de la faute des ouvriers qui bossent trop bien s’ils se font lourder… Marre d’être pris pour des cons, vraiment !
À l’heure actuelle, les grévistes revendiquent principalement le droit à une prime de licenciement substantielle, loin des extraordinaires… 6000 euros (!) que la direction avait proposés aux futurs privés d’emplois. Pourquoi pas une prime de licenciement en tickets restos tant qu’on y est… La lutte continue, et pourrait faire des petits et se renforcer autour de l’idée qu’il ne doit pas y avoir de licenciements du tout. Aujourd’hui les grévistes se disent déterminés à tenir tant qu’il le faudra. Ils ne sont pas inquiets, les collègues les soutiennent et ils savent qu’ils tapent là où ça fait mal, la direction est déjà venue pleurnicher qu’elle n’arrivait pas à livrer ses clients et qu’elle se faisait taper sur les doigts. Tant mieux, c’est comme ça qu’on gagne, en tapant au portefeuille ! D’autant que le site de Rouen n’est pas le seul en lutte, le site du Havre, qui lui aussi connaît un PSE, est en grève, et d’autres sites en France qui ne sont pas directement menacés (dont celui de Moudenx près de Pau) ont fait des grèves de soutien. Ils savent que ce PSE n’est que le premier d’une longue série et que gagner sur celui-ci posera de bonnes bases pour la suite.
Lubrizol est loin d’être la seule entreprise touchée par un tel plan de licenciements, c’est toute l’Europe qui est balayée par une attaque violente contre les travailleurs et travailleuses. Pour gagner, il faudra qu’on lutte partout, ensemble, dans tous les secteurs, en dépit de l’absence de stratégie de combat affichée par les directions syndicales. Les travailleurs de Lubrizol doivent inspirer tous les autres, faisons que leur lutte fasse tache d’huile.
Correspondants