Nos vies valent plus que leurs profits

Lutte contre l’extrême droite ou avilissement devant l’État bourgeois ?

Depuis la condamnation de Marine Le Pen pour détournement de fonds publics, le milieu politicien est en émoi. Pensez donc, en l’état, elle ne pourrait pas se présenter à l’élection présidentielle de 2027 ! Et les réactionnaires de se précipiter pour critiquer la décision judiciaire, jusqu’au Premier ministre, Bayrou, qui s’est déclaré « troublé ». Même Mélenchon s’est cru obligé de déclarer que « la décision de destituer un élu devrait revenir au peuple » (comme si Le Pen avait été destituée !). Premier résultat, la cour d’appel de Paris annonçait un appel possible « dans des délais qui devraient permettre de rendre une décision à l’été 2026 ». Aucun justiciable ordinaire ne bénéficierait d’un tel traitement de faveur…

Le parti d’extrême droite ne s’en est pas satisfait. En plus des vociférations et des hurlements de ses députés à l’Assemblée, il a appelé le 6 avril à une grande manifestation nationale à Paris « pour sauver la démocratie ». Peut-être espérait-il qu’en se posant en victime il ferait oublier ses prévarications et gagnerait en popularité ? Las, malgré une campagne intense et des cars affrétés dans tout le pays, ils se sont retrouvés moins de 7000. Il est vrai que ça n’a pas ému grand monde que Le Pen et son parti se soient fait prendre la main dans le sac et les doigts dans le pot de confiture : après tout, chacun sait que ce sont bien des politiciens bourgeois comme les autres, aussi vénaux et corrompus.

Les Écologistes, LFI et Solidaires le 6 avril, et quasiment toute la gauche politique, associative et syndicale le 12, ont appelé de leur côté à des manifestations en « défense de l’État de droit, de la République et de la démocratie ». « Nous sommes très inquiets par la situation en France, par les remises en cause de l’État de droit et de l’indépendance de la justice », a déclaré Sophie Binet pour la CGT, moins pressée pour appeler les travailleurs à riposter aux attaques patronales… Garantir nos libertés démocratiques et lutter contre l’extrême droite en défilant pour la défense de la République, de l’État et des institutions ? Ces institutions soumises corps et âme aux intérêts du grand patronat, qui organisent avec méthode et brutalité l’appauvrissement de la population laborieuse et qui édictent et font appliquer des lois racistes qui ne visent qu’à diviser nos forces ? Les dirigeants syndicaux comme ceux des partis de gauche comptent sur les institutions, alors que seule la mobilisation des travailleurs sur leurs propres revendications peut développer la conscience et l’organisation qui permettra de vaincre l’extrême droite.

15 avril 2025, Michel Grandry