Nos vies valent plus que leurs profits

Mayotte : le prix du mépris

À Marseille, la communauté mahoraise et comorienne représente près d’un habitant sur dix, chez les jeunes peut-être encore plus. Pourtant, suite au drame qui a touché Mayotte, personne dans la direction de l’académie et des services de l’Éducation nationale d’Aix-Marseille ne se soucie du sort des élèves, dont les proches, y compris pour certains les parents, sont touchés et parfois de la manière la plus tragique qui soit. Pas un mail pour demander aux enseignants de s’enquérir de la santé psychologique des jeunes, pas un mot en direction des élèves ou des familles pour témoigner d’une quelconque solidarité ou d’une simple émotion. Rien. Le sort des Mahorais et des Comoriens vivant à Mayotte n’aurait-il aucune valeur ?

Ici, des enseignants improvisent une minute de silence, là, d’autres témoignent aux jeunes leur solidarité et leur effarement face à l’horreur de la catastrophe, ailleurs des représentants du personnel s’indignent dans les conseils d’administration du mutisme de leur direction.

Bien sûr, agents de l’Éducation nationale, nous nous doutions que l’institution n’allait pas dénoncer la situation sociale et politique responsable de l’ampleur du drame, qu’elle n’allait pas pointer du doigt les politiques migratoires ultra répressives poussant certains habitants à avoir davantage peur d’un contrôle d’identité ou de la police que du cyclone lui-même ; mais de là à rester de marbre quand tant de jeunes restent suspendus à l’attente de nouvelles de leurs proches… À croire que les jeunes des communautés mahoraises ou comoriennes vivant en France métropolitaine n’ont pas la même valeur que d’autres jeunes gens de leur âge qu’ils côtoient pourtant en classe. Ou pire encore, que, souvent plus pauvres et vivants dans des quartiers défavorisés, ils seraient insensibles ou déjà suffisamment endurcis face aux malheurs et tragédies.

Une vision horriblement coloniale, mais pas si étonnante quand on voit le traitement économique, politique et médiatique, tout aussi colonial, que subit Mayotte depuis des années et qui est en grande partie responsable du nombre de morts et de disparus. En même temps, qu’attendre des représentants d’un gouvernement qui annonce débloquer une « enveloppe d’urgence » de 655 000 euros pour une aide à Mayotte ? La vie de milliers de Mahorais et de Comoriens ne vaudrait-elle même pas le prix d’une villa au bord de la mer ?

Correspondante