Quelques heures après l’annonce de plan social chez Auchan, mardi 5 novembre, la direction de Michelin déclarait fermer les sites de Cholet et de Vannes. En une journée, 3 600 travailleurs ont appris de leurs patrons millionnaires la disparition de leur gagne-pain. Contre ces licenciements massifs, seule l’union du monde du travail pourra faire reculer le patronat. Les salariés de Michelin à Cholet semblent capables de montrer la voie.
Parmi les travailleurs de Michelin, « on reste soudés »
Avec son annonce de fermeture d’ici à 2026, la direction de Michelin met 955 salariés sur la paille à Cholet, auxquels s’ajoutent les 299 de Vannes et des centaines parmi les entreprises sous-traitantes. Depuis, un piquet de grève est entretenu jour et nuit devant l’usine de Cholet, rue de Toutlemonde. Les réactions mêlent indignation et colère, abattement et angoisse de l’avenir. Des familles sont concernées, « mon salaire permet de payer le loyer que j’ai avec mon fils », rapporte l’un. « Mes jeunes faisaient leur job d’été ici », témoigne un autre.
Lorsque la production recommencera, mardi 12 novembre, tous n’auront pas participé au mouvement de grève intersyndical. « On a besoin de notre salaire », soupire un salarié, « mais je serai solidaire des grévistes ». Il poursuit en résumant l’état d’esprit général : « La direction et l’État nous abandonnent, mais entre collègues on reste soudés. On ne lâchera rien à Michelin. »
Michelin ferme malgré des records de bénéfices
Et il y a de quoi récupérer à la direction et à ses actionnaires. Le leader mondial de fabrication de pneumatiques a enregistré un record de bénéfice opérationnel en 2023, de 3,6 milliards d’euros, et un bénéfice net de 2 milliards. Des bénéfices sur le dos des travailleurs, les plus âgés soulignent « une santé flinguée », et s‘ajoute à l’angoisse de l’avenir, le sentiment d’une « trahison ». Mais, à Cholet, celles et ceux qui fabriquent des pneus premium, ne comptent pas se laisser faire. Les mauvais coups étaient dans l’air : l’hiver dernier l’un des quatre blocs de fabrication avait été démonté, la production avait baissé.
La riposte s’organise
À côté des réunions de l’intersyndicale (CGT, Sud et CFDT), des visites de politiciens en tout genre – dont le ministre de l’Industrie qui n’a tenu que trois minutes sous les huées –, les salariés ont commencé à prendre leurs affaires en main. Une première assemblée des travailleurs a eu lieu immédiatement après l’annonce, mardi 5, une autre le lendemain. Sur un site fermé provisoirement par la direction, une troisième assemblée a rassemblé 200 personnes jeudi. Le lancement d’une grève a été votée, une manifestation s’est organisée dans la zone industrielle vendredi 8, réunissant près de 600 personnes (au même moment où Clermont-Ferrand débrayait aussi par solidarité), et une délégation en direction du siège à Clermont-Ferrand est prévue pour le mercredi 13 novembre.
Si la plupart des salariés semblent donner leur confiance aux syndicats, ils pourront aussi et surtout s’appuyer sur leur propre force, celle du monde du travail, qui fait tourner toute la société. Les plans sociaux imposés par le patronat se multiplient. À Cholet, des sites comme ceux de Jeanneau, Charal et Nicoll pourraient suivre. Les travailleurs de Michelin ne doivent pas rester isolés.
L’initiative d’aller manifester dans la zone industrielle montre le chemin à suivre. C’est en unissant les forces qu’on pourra lutter efficacement contre les licenciements.
Correspondants