Après s’être déchirés depuis des mois, les représentants du PC, de LFI, du PS et d’EELV se sont mis d’accord en moins de vingt-quatre heures sur un nom, un programme, avant de se répartir les circonscriptions et d’introniser leurs candidats. La gauche prétend « faire rempart » contre l’extrême droite aux portes du pouvoir, et elle fait fort en réhabilitant François Hollande, le président des lois Travail, de la répression des manifestations, celui qui a mis Macron en selle. Le voilà candidat de la NFP, pour rallier les classes populaires contre l’extrême droite ? Ou cet Aurélien Rousseau, jusqu’il y a quelques mois ministre de la Santé de Macron, lui aussi candidat NPF ? Les personnels soignants se frottent les yeux !
Des « fronts républicains » avant tout anti-ouvriers
La perspective de la venue au pouvoir de l’extrême droite est évidemment inquiétante. Mais les perspectives ouvertes par l’accord de toute la gauche gouvernementale sous la bannière NFP n’ont rien pour rassurer. Car quelle serait l’alternative la plus probable à la victoire pure et simple du RN et de ses alliés ? Les macronistes ne présenteront personne contre François Hollande en Corrèze, officiellement pour favoriser le député LR sortant. À défaut d’un accord national entre macronistes et LR, qui aurait embarrassé les uns comme les autres, c’est localement que les arrangements sont faits, pour préfabriquer un bloc de second tour supposé capable de battre les candidats RN. À moins qu’en Corrèze, Macron ne veuille aussi favoriser Hollande – bien « centriste » aussi !
Du côté des dirigeants du NFP, nul doute qu’ils nous appelleront au second tour à voter pour le candidat « républicain » le mieux placé pour faire barrage à l’élection d’un député RN, comme ils l’ont fait à chaque élection depuis 2002. Jusqu’à quand va-t-on faire croire aux travailleurs qu’ils en sont réduits à ne pouvoir choisir qu’entre moche, pire et moins pire ?
Avec les attaques de Macron contre les chômeurs, contre les migrants, contre les travailleurs en général, nous avons une idée de ce qu’est une politique pro-patronale « décomplexée ». Avec le RN, ce serait pire. Mais une majorité constituée autour d’un « front républicain », ce serait, dans le meilleur des cas, Macron gouvernant avec tous ceux qui ont sévi sous Hollande. Ce ne serait pas l’extrême droite, mais ce seraient tout de même des gouvernements militaristes, anti-migrants, anti-ouvriers. Sans doute pire que ce que nous avons connu jusqu’ici s’ils étaient rassurés sur nos réactions.
La solution contre l’extrême droite n’est pas dans les urnes, mais dans notre capacité à reprendre l’offensive pour récupérer par nos luttes tout ce qui nous a été volé au fil des ans sous la houlette de gouvernements de droite comme de gauche.
Jean-Jacques Franquier