Le 26 juillet dernier, le corps d’élite de la garde présidentielle a déposé l’ancien président Mohamed Bazoum. Aujourd’hui, c’est du côté du gouvernement français et de ses alliés qui gouvernent les pays voisins d’Afrique de l’Ouest qu’on entend des bruits de bottes, une menace d’intervention militaire. Car, même si le peuple travailleur du Niger n’a rien à attendre de bon du coup d’État militaire, celui-ci bouscule les intérêts de l’ancienne puissance coloniale française. Comme les renversements récents d’autres gouvernements dociles envers les intérêts commerciaux de Paris, au Mali et au Burkina Faso, ce changement rélève bien plus des révolutions de palais. Mais le gouvernement français, les groupes comme Bouygues, Total, ou Orano (ex-Areva) veulent des palais à leurs bottes.
Un bilan désastreux
Le Niger avec ses 25 millions d’habitants est un pays riche peuplé de pauvres. Les richesses minières sont immenses (dont l’uranium) avec 47 % de sa population vivant dans une pauvreté absolue, à peine 11 % accèdent à des services sanitaires et 7 % vivraient une condition d’esclavage. Ce résultat est celui du bilan de l’aide au développement de Paris, le nouveau nom de la domination indirecte de la France sur cette ancienne colonie. D’un côté le pillage, la corruption généralisée, le saccage (Orano, l’exploitant français des mines d’uranium a laissé vingt millions de tonnes de déchets radioactifs à ciel ouvert). De l’autre, la misère pour le plus grand nombre.
Une présence insupportable
Il n’est donc pas étonnant qu’une partie de la population de la capitale Niamey ait manifesté pour le départ de la présence française. Pour Macron et les patrons français, l’évacuation en catastrophe de près de 500 ressortissants français, la demande de la junte militaire du départ des 1 500 soldats défenseurs des multinationales au drapeau tricolore a ouvert une crise sans précédent. Ce troisième revers, après le Mali et le Burkina Faso, pour les ambitions coloniales du soldat Macron remet en cause la présence des capitalistes de Paris et leur pillage dans cette région du Sahel.
Loin d’une révolution anticoloniale
Certes, la nouvelle junte qui règne à Niamey a pour seul programme la fin de la présence militaire française, un anticolonialisme limité qui ne touche pas les intérêts des entreprises françaises et garde le silence sur la présence d’une autre base militaire, celle des États-Unis. Ce groupe d’officiers, comme ceux du Mali et du Burkina Faso, essaie de jouer des rivalités entre puissances impérialistes : entre la France, les États-Unis et celles qui pointent déjà leur nez, la Russie déjà sur le plan militaire, la Chine sur le terrain économique. Poutine, qui a tenu son « sommet » à Saint-Pétersbourg avec des pays africains, a promis ses réserves de blé. Pour l’instant, l’Afrique a surtout vu ses milices Wagner.
Les dangers à venir pour les exploités du Niger et de la région
À l’heure où nous écrivons, nous ne savons pas encore si les menaces de la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, et l‘ultimatum militaire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) dirigée par le Nigeria, qui vient d’arriver à échéance, vont se conclure par une intervention militaire, qui ne sera pas pour la démocratie ou le respect de la Constitution comme dira Macron, mais pour l’uranium. Mais, déjà, la presse souligne les risques que cela entraîne une guerre généralisée à tout le Sahel, avec des crises internes comme l’illustre l’opposition parlementaire au Nigeria contre l’intervention.
Alors toute notre solidarité va aux populations pauvres, aux peuples travailleurs des villes et des campagnes du Niger et de la région, qui connaissent le pillage et la misère, les affrontements entre clans locaux concurrents pour le pouvoir, mais aussi et surtout les opérations militaires, directes ou par troupes africaines interposées, des grandes puissances prédatrices de l’Afrique, la France en tête. Ils n’ont rien à attendre de dirigeants ou chefs militaires qui s’auto-proclament « sauveurs de la nation » . C’est l’unité des travailleurs à l’échelle du continent qui pourra ouvrir une voie pour sortir de la domination et construire un autre futur. Nous partageons leur révolte contre le pillage colonial qui perdure, et en premier la mainmise de l’impérialisme français, de ses patrons sur toute une partie du continent africain.
Troupes françaises hors d’Afrique !
Non à l’intervention militaire !
Éditorial du NPA du 7 août 2023