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Que contient la loi Macron-Le Pen ?

Macron a attendu la fin 2023 pour relancer son projet maintes fois évoqué d’une nouvelle loi raciste. Après une série de péripéties parlementaires, la loi « immigration » a donc été adoptée avec le soutien de la majorité des députés macronistes, de la droite traditionnelle et de l’extrême droite. Elle reprend une bonne partie des propositions récentes du Rassemblement national. Retour sur les principaux changements introduits par la loi.

La « préférence nationale » pour les aides sociales : un racisme pas voilé du tout

Les aides au logement ne seront désormais accessibles aux étrangers qu’après cinq ans de présence sur le territoire (ou trois mois de travail) contre six mois précédemment. Les étudiants étrangers font exception : ils conserveront l’accès immédiat à ces aides.

Le droit au logement opposable ne sera accessible aux étrangers qu’après cinq ans de présence (ou deux ans et demi pour ceux qui travaillent) contre six mois précédemment. Les réfugiés et titulaires d’une carte de résident de dix ans bénéficieront d’une exception et conserveront un accès immédiat aux aides et au droit au logement.

Les prestations familiales ne seront désormais accessibles aux étrangers qu’après cinq ans de présence sur le territoire (ou deux ans et demi pour ceux qui travaillent) contre six mois précédemment. Cette limitation ne s’appliquera toutefois ni aux réfugiés, ni aux titulaires d’une carte de résident de dix ans, et ne concernera pas l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) et l’allocation versée en cas de décès d’un enfant.

Cela revient à bloquer l’accès à ces aides pour une grande partie des travailleurs étrangers. La « préférence nationale » est un euphémisme pour dire « discrimination raciste ». Laisser faire une telle attaque contre une partie de notre classe serait dramatique : qui peut croire que cela bénéficiera à quiconque si ce n’est au patronat ?

Le « droit du sol » remis en cause

Aujourd’hui, les jeunes nés et qui ont grandi en France, acquièrent automatiquement la nationalité française à leur majorité ou sur demande à partir de l’âge de 13 ans. Le caractère automatique de l’obtention de la nationalité sera supprimé, remplacé par une démarche entamée entre 16 et 18 ans. Cette proposition implique qu’un ou une mineure doit être en mesure de disposer de l’information et comprendre l’importance de cette démarche sous peine de perdre le droit en question. C’est une manière détournée mais effective de priver d’accès à la nationalité de nombreux jeunes. Comme si les jeunes étrangers étaient intrinsèquement une menace pour la société.

Le délit de séjour irrégulier rétabli

Le délit de séjour irrégulier est par ailleurs rétabli (il avait été supprimé en 2012), passible de 3 750 euros d’amende et de trois ans d’interdiction du territoire. En plus d’instituer une embûche supplémentaire sur le chemin de la régularisation, il s’agit littéralement de faire des sans-papiers des délinquants.

Exclusion des personnes visées par une OQTF (obligation de quitter le territoire français) du droit à l’hébergement d’urgence

Tout étranger visé par une OQTF sera exclu du droit à l’hébergement d’urgence, sauf situation de « détresse grave ». On se demande bien ce que peut être une « détresse non-grave »… Chaque mot de cette loi est une insulte à la solidarité de classe et à l’humanisme le plus élémentaire !

Cette loi précarise plus particulièrement les femmes sans papiers, majoritairement employées dans les métiers du soin et du lien, sous-payées, très souvent à temps partiel. Les femmes étrangères en situation monoparentale seront encore plus précarisées qu’auparavant par le durcissement des conditions d’accès aux aides sociales. Les migrantes seront quant à elles encore plus exposées aux violences sexistes et sexuelles, en particulier dans le cadre des réseaux de traite humaine et de prostitution.

Contrat de méfiance

Tout étranger, au moment de sa régularisation, devra signer « un contrat d’engagement au respect des principes de la République », dans lequel il ou elle s’engage à respecter « la liberté personnelle, la liberté d’expression et de conscience, l’égalité entre les femmes et les hommes, la dignité de la personne humaine, la devise et les symboles de la République ».
 Au-delà de l’aspect parfaitement discriminatoire d’un tel contrat, qui revient à soupçonner les étrangers d’être plus enclins à enfreindre tel ou tel « principe », les préfectures pourront décider arbitrairement lors du renouvellement du titre de séjour quelle infraction justifierait de faire basculer le ou la demandeuse dans la condition de sans-papiers.

Pas de facilitation des régularisations par le travail

Malgré tout le tintamarre autour des « secteurs en tension » où les régularisations étaient censées être facilitées, aucune garantie n’est donnée par ce texte. La marge d’appréciation des préfets est renforcée dans le traitement au cas par cas des régularisations par le travail. En dehors de la régularisation de toutes et tous les sans-papiers et plus largement de l’égalité intégrale des droits entre nationaux et étrangers, ce sont forcément des travailleuses et des travailleurs étrangers, avec ou sans-emplois, jeunes ou moins jeunes, qui se retrouvent à la merci du moindre contrôle de police et privés d’une grande partie de leurs droits.

Les étudiants et étudiantes étrangers devront fournir une caution pour avoir accès à un titre de séjour

L’obtention d’un titre de séjour portant la mention étudiant est subordonné au dépôt d’une caution qui sera restituée au moment du départ ou dans l’hypothèse d’une régularisation future et conservée au cas où la personne concernée se sera soustraite à une mesure d’éloignement. L’objectif de cette mesure est évidemment d’effectuer un « tri » plus drastique parmi les jeunes, jugés plus ou moins utiles pour devenir de la chair à patron.

Vous reprendrez bien une louche de racisme ? Prochaine étape : l’AME

La suppression de l’aide médicale de l’État n’a pas été adoptée. Macron a annoncé sa volonté de s’attaquer à la question début 2024. L’accès universel aux soins est une question essentielle pour notre classe : moins la partie la plus vulnérable de notre classe est correctement soignée, plus l’état général de santé de la population dans son ensemble se dégradera. Sauf pour la petite minorité bourgeoise qui de toute façon a et aura les moyens de payer.

Hakim Guessou