Nos vies valent plus que leurs profits

Que faire face à la dette ?

La dette publique est l’un des moyens par lesquels les États des pays riches arrosent leur bourgeoisie tout en en faisant peser la charge sur les classes populaires, non seulement de leur propre pays pour leur propre dette, mais aussi de celles des pays pauvres, ou moins riches, dont leurs banques détiennent la dette. Aussi, quand émerge dans tel ou tel pays soumis au diktat des institutions financières internationales la revendication de l’annulation de sa dette, les révolutionnaires des pays riches ne peuvent qu’être solidaires1, d’autant plus qu’avec les taux imposés, le montant de la dette a souvent été plusieurs fois remboursé bien avant l’échéance.

Sur la lancée de la revendication de l’annulation de la dette des pays pauvres, certains économistes « radicaux », mais aussi Philippe Poutou lors de la dernière campagne présidentielle, ont prôné l’annulation d’une partie de la dette française, celle détenue par la BCE. Afin d’alléger la charge de la dette – actuellement de 50 milliards. L’annulation de la dette, ce serait certes l’annulation de sa charge et cela s’en prendrait aux intérêts des banques. Mais qu’en serait-il des autres capitalistes ? Car la dette publique aboutit forcément dans les caisses des entreprises, en priorité les plus grosses, et c’est pour les servir que la dette est contractée. Faudrait-il les dédouaner ?

Certains distinguent ce qui serait la partie « légitime » de la dette, celle qui sert à l’investissement public, et sa partie « illégitime », celle qui ne fait qu’arroser la bourgeoisie. Mais même les dettes dites « légitimes » servent – en plus d’alimenter des réseaux personnels par le choix des entreprises – tout simplement à réaliser les profits des entreprises : la distinction entre dette « légitime » et « illégitime » est douteuse !

La dette, en particulier sa charge, doit être intégralement assumée par les capitalistes, industriels ou banquiers, c’est-à-dire ceux qui en profitent. Si l’on ajoute les 50 milliards de la charge de la dette aux 80 milliards d’exonérations de cotisations sociales payées par l’État à la place des patrons pour les bas salaires, cela commence à faire une somme qui serait bien utile pour les hôpitaux, l’éducation, les transports, le logement !

Le problème n’est donc pas l’annulation d’une partie de la dette, mais de s’en prendre à la bourgeoisie, ce qu’aucun parti de gouvernement n’est évidemment prêt à faire. Les bolcheviks, eux, avaient résolu la question de la dette de l’ancien régime de façon radicale : en disant que cette dette n’était pas la leur et en la supprimant purement et simplement !

Jean-Jacques Franquier


 

 
1 Les créanciers eux-mêmes peuvent d’ailleurs parfois y satisfaire quand c’est leur intérêt. C’est ainsi que l’Égypte a bénéficié de l’annulation de la moitié de sa dette par ses créanciers au moment de la première guerre du Golfe, afin de s’assurer de son soutien à l’intervention occidentale.

Cet article est paru dans un dossier de Révolutionnaires no 23

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