Lors du dernier sommet « Choose France » du 15 mai au château de Versailles, Macron cherchait à convaincre deux cents dirigeants d’entreprises françaises ou étrangères d’investir massivement dans l’Hexagone. Avec plusieurs annonces d’implantation ou extensions industrielles, il érige la réindustrialisation en « mère des batailles » pour conserver la France à sa première place de pays européen le plus attractif pour les capitaux étrangers.
Macron s’est rendu à Dunkerque pour confirmer l’ouverture de deux usines de batteries électriques, celle du constructeur taiwanais ProLogium (5,2 milliards d’euros investis) et celle du Chinois XTC et du Français Orano (1,5 milliard investis).
De quoi vanter la création de « 20 000 nouveaux emplois industriels d’ici la fin de la décennie dans le bassin de Dunkerque », alors que des travailleurs, notamment de l’usine menacée de fermeture de Valdunes, manifestaient.
Les Hauts-de-France, particulièrement le secteur automobile, sont la cible de cette politique de « réindustrialisation ». Pour la période 2022-2027, le gouvernement compte investir dans tout le pays 54 milliards d’euros en faveur de l’industrie et de la « transition écologique ».
Plusieurs usines de batteries électriques ont été implantées au plus près des usines automobiles en pleine restructuration : ACC à Douvrin pour Stellantis et Mercedes, Envision Douai pour Renault. Alteo et Wscope (composants de batteries) parlent d’investir 600 millions à proximité de Toyota. Il s’agirait de garantir un approvisionnement sécurisé de batteries électriques, face à la Chine qui possède un quasi-monopole sur leur production.
Pour ses champions, l’État met les moyens. Pour l’usine ACC, Stellantis, Mercedes et Total vont toucher 1,3 milliard d’euros de subventions. Xavier Bertrand rappelant que les collectivités ont mis « 60 millions d’euros pour Verkos, 60 pour Envision et 80 pour ACC. »
En 2019, l’État avait versé 160 milliards de subventions pour les entreprises, subventions qui ont explosé depuis la pandémie. Pour créer des emplois ? Pour ne prendre que l’exemple de l’usine ACC de Douvrin, 400 emplois auraient été créés… Mais juste à côté, l’usine PSA de fabrication de moteurs, avec 1 200 salariés, doit fermer en 2025. De fait, les emplois à ACC seront surtout pour les ingénieurs et techniciens de PSA Douvrin, très peu pour les ouvriers.
Pour concurrencer les pays asiatiques, l’État français a investi 2,9 milliards d’euros sur 5,7 milliards dans la nouvelle usine de micro-processeur de STMicroelectronics, qui s’engage à fournir 1 000 emplois. À ce prix-là, l’État aurait directement pu payer 5 000 salariés pendant 10 ans à 2 500 euros net !
Quant à la gauche, elle accorde en réalité ses violons à la partition patronale : il faut la « préférence nationale » pour le PCF, des barrières douanières écolos européennes pour EELV, ou encore réclamer le « non-respect de la concurrence européenne » pour LFI. Autant de positions qui sont autant d’outils au service du patronat français dans sa lutte contre ses concurrents internationaux. Les délocalisations ou relocalisations ne visent qu’à opposer les travailleurs de tous les pays pour mieux les exploiter tous.
Stefan Ino
(Article paru dans Révolutionnaires numéro 3, été 2023)