Nos vies valent plus que leurs profits

Sans le PS, Lecornu serait à poil

À l’heure où nous écrivons, le 14 octobre, nous ne savons pas si l’attelage PS-Macron-LR durera plus que quelques jours. Mais, qu’il y parvienne ou non, le fait même que le PS ait fait le choix de voler au secours de Macron est significatif.

Il est clair que cette alliance se fait sur le programme de Macron. Les mesures d’austérité sont particulièrement brutales, en particulier dans le domaine de la santé. Les concessions faites au PS, la suspension de la réforme des retraites ou la taxe sur les holdings (mais dont sont exonérés les « patrimoines professionnels » comme, simple exemple, les actions !), sont seulement symboliques.

Le PS a certainement voulu éviter une dissolution qui aurait mis en danger ses places de députés. Mais cette compromission avec le président des riches lui coûtera cher électoralement à l’avenir. Que cette manœuvre ait été portée par Hollande lui-même, dont Macron avait été le Brutus en 2017, montre à quel point ces gens ont peu de rancune personnelle.

Non, le PS a agi essentiellement par esprit de responsabilité à l’égard du patronat qui réclame la fin de cette crise parlementaire. Ce parti a joué ce rôle de pilier du système capitaliste dans toutes les crises, dans l’opposition (vote des 350 milliards aux patrons pendant le Covid, sauvetage des banques en 2008) ou au pouvoir, où il a toujours attaqué les travailleurs et multiplié les interventions militaires impérialistes, en Afrique notamment.

Ceux qui, à gauche, crient à la « trahison » font mine d’avoir la mémoire courte. Car on ne peut être trahi que par ceux en qui on a mis sa confiance. La FI de Mélenchon, pressée d’accéder au pouvoir pour gérer les affaires de la bourgeoisie, a remis en selle le PS avec la Nupes en 2022 et le NFP en 2024. Et elle proposait de réanimer ce « front » pas plus tard que la semaine dernière, que ce soit pour une dissolution avec « objectif cohabitation » (avec Macron !) ou dans le but d’obtenir une majorité à la suite d’une élection présidentielle anticipée. Dans tous les cas, il s’agit de gouverner avec le PS, donc sur la base de son programme qui sera le plus petit dénominateur commun. C’est une impasse.

Seules nos luttes pourront permettre de contrer vraiment la progression de l’extrême droite et de mettre un terme à l’offensive patronale. Des luttes dirigées par les travailleurs eux-mêmes, et pas dévoyées par les appareils syndicaux liés à la gauche de gouvernement. Des luttes qui pourront d’ailleurs entraîner les milliers d’électeurs et de militants sincères de ces partis de gauche institutionnels. D’où l’urgence de construire un parti révolutionnaire communiste qui défende les intérêts des travailleurs jusqu’au bout – au moins autant que Macron et le PS défendent les intérêts des patrons !

Raphaël Preston

 
 

C’est qui le patron ?

Discours de politique générale de Lecornu, 14 octobre : « J’ai pris des engagements, ceux que les oppositions demandaient. J’en prends un supplémentaire et il doit être entendu par chacun, y compris par nos prêteurs sur les marchés financiers : je n’endosserai pas un résultat qui mettrait en danger la crédibilité de notre pays. » La « crédibilité du pays », c’est donc la capacité à payer des intérêts aux « prêteurs », c’est-à-dire aux banques et autres fonds qui vivent de la spéculation en général et des rentes offertes par la dette de l’État en particulier. Voilà auprès de qui un Premier ministre doit « s’engager » en régime capitaliste.

L’extrême droite en embuscade

Wauquiez des LR comme Vallaud du PS ont prétendu que leur ralliement à Macron visait à empêcher le RN d’accéder au pouvoir à la faveur d’une dissolution. Mais comme chacun le sait désormais, ce genre de barrage ne peut que faire monter l’eau.

Le Pen se paye le luxe d’apparaître comme une opposition résolue sur le terrain parlementaire (au même titre que LFI), tout en ayant la certitude que, même sans législatives anticipées, c’est sa démagogie raciste qui sera à l’ordre du jour de cette Assemblée à la majorité très à droite. Et ce n’est pas le Sénat de Larcher qui va la contrarier !

Lecornu a déjà multiplié les clins d’œil. Il a affirmé dans son discours de politique générale que « les enjeux migratoires à venir, tant liés à la démographie, au réchauffement climatique et au terrorisme posent un défi imminent ». Un « défi », les réfugiés qui fuient la misère et la guerre ? Sauf à prétendre, par amalgame raciste calculé, que ce sont des « terroristes » !

La composition du gouvernement est à l’avenant. Pour n’en citer qu’un, Vincent Jeanbrun, maire dans le Val-de-Marne, adepte du tout-sécuritaire et habitué des plateaux de CNews. Ses deux propositions phares : interdire les HLM aux chômeurs et limiter à 30 % le taux de logements sociaux. Un vrai progressiste !

Le marchepied au RN s’est transformé sous Macron en escalier roulant – ascenseur pour l’échafaud. À moins de remettre nos préoccupations de travailleurs et de travailleuses sur le devant de la scène. Dans les périodes de lutte, comme celle que nous avons vécue pas plus tard qu’en septembre avec trois grèves nationales réussies, l’extrême droite se tait, car elle n’a rien à dire, tant sa démagogie contre les travailleurs immigrés ou privés d’emploi n’a d’égal que sa soumission au patronat.